vendredi 10 avril 2009

chapitre N-16

##N-16
. "Délit de savoir" était une socio-fiction proche dans laquelle un très grand nombre de savoirs avaient été brevetés au point que le simple fait d'en avoir connaissance (par exemple certains algorithmes) sans même s'en servir était un délit, ainsi que de les communiquer. Ceci correspondait à la tendance amorcée depuis longtemps par la législation américaine pour tout mettre sous contrôle de copyright américain, y compris ce qu'ils n'avaient pas du tout inventé mais juste pioché dans la nature ou dans les savoir-faire d'autres gens. Ca pouvait aussi faire penser au système (refusé en droit français: merci l'ELR) des "copy control" sur les supports enregistrés les rendant inutilisable dans beaucoup de matériels parfaitement légaux et sans possibilité de se faire rembourser le produit. Sauf en France, où le vendeur était passible d'une peine pour escroquerie, à moins d'accepter de rembourser cinq fois la valeur du produit délibérément vendu défectueux au client, car ne passant pas dans son matériel pourtant classique: c'était la priorité donné à l'ancienne loi sur l'interopérabilité des systèmes et logiciels par rapport à celle que tentaient d'imposer des multinationales. Le vendeur pouvait à son tour exiger de son fournisseur le remboursement de ce qu'il avait eu à payer au client, et ainsi de suite. La France avait donc bloqué les projets de protection anticopies "donnant des capacités d'utilisation hors copie inférieures à celles d'une version libre de toute protection", là était le critère. De plus les taxes sur les supports vierges ne servant pas qu'à ça, mais le plus souvent de sauvegardes ou transport de données informatiques privées, avaient été supprimées. Or dans le projet de "copy control", même la simple détention d'un logiciel de décryptage (et non son utilisation) eût été poursuivie, ce qui aurait instauré le délit de savoir: savoir faire quelque chose, même sans le faire, devenait passible de poursuite. Le film était donc sur ce theme, avec l'International Knowledge Corporation (IKC) reignant en maître, via des gouvernements soudoyés, pour interdire domaine par domaine aux gens de faire quoi que se soit d'autre que de purement basique sans verser une redevance. Des résistants devaient alors poser des bombes, envoyer des roquettes (tant qu'à se procurer des savoir-faire interdits, pourquoi pas ceux-là? Ils ne risquaient rien de plus à connaître la formule du gaz sarin que certaines primitives d'intégrales en math), enlever et torturber des sbires des hautes sphères pour essayer de changer les choses. Y arriveraient-ils? Ca donnait prétexte à un "thriller" d'action mené chonomètre en main, ressemblant à une partie d'échecs où pendant qu'une situation allait échouer une autre était mise en place pour profiter de ce que la première n'avait pas encore été découverte, et ainsi de suite, sorte de châteaux de cartes construit en reprenant celles du bas, et où les Etats-Unis (ainsi que le Gatt, l'Onu, la Commission Européenne et tous les "machins" inféodés à Washington) jouaient le rôle d'une URSS du savoir, avec un "Knowledge General Bureau" (KGB) très actif ayant absolument tous les droits, y compris de violer ces redoutables lois américaines sur le brevetage de la connaissance. Erwann jouait un encaisseur de l'IKC qui finissait par changer de camp, suite à la déportation de deux membres de sa famille pour avoir appris (en fait redécouvert tous seuls) une méthode de tri par rampes pour classer des centaines d'anciens numéros d'une revue sur les trains, alors que seules les méthodes les plus inefficaces (tri par permutation, par sélection ou insertion) étaient autorisées à être divulguées. Il en allait de même des compressions de données, etc: "bientôt on va interdire la multiplication: quand on voudra faire 15 fois 22, il faudra faire 22+22+22...". Ce n'était qu'une exagération (et peut-être n'en resterait-elle pas une) de ce qui était réellement à l'oeuvre dans le domaine de l'interdiction du savoir par les instances mondiales d'obédience américaine, selon VTP. Des cas néo-staliniens avaient déjà eu lieu dans d'autres domaines, comme au Canada où (pour de vrai) il suffisait à un semencier américain monopolistique de prouver qu'il y avait au moins une graine de même génome que les siennes par sac pour saisir toute la récolte, et qui faisaient condamner des agriculteurs pour la présence de quelques plans OGM dans leurs camps sans paiements alors que c'était la polénisation par les planteurs d'OGM qui en était la cause.
. VTP produisait des OGM mais n'interdisait à personne d'en ressemer "de toute façon, en raison des lois françaises de non-contamination par OGM, ils ne pollénisent pas et sont tous stériles. Les variétés fertiles qui les engendrent sont cultivées dans des serres étanches de haute sécurité, tant contre l'espionnage que la propagation accidentelle. On ne vous interdit rien, mais si on essayez d'en replanter ça ne marchera pas, c'est tout".

. Les techniques du Dynamo de Dinan rejoignaient maintenant (mais avec les spécificités du rugby) celles du rinnepallo, à ceci près qu'il manquerait toujours (à moins que la fédération ne fît une réforme) les données numériques collectées sur les matchs des autres équipes pour mieux permettre à chacune de les étudier en détail. Torbjörn Hultgren était de plus en plus utilisé mais toujours pas dans les matchs, faute d'autorisation officielle de VTP. En fait, VTP ne savait pas qu'il jouait "pour de bon" les matchs d'entraînement interne, et supposait qu'il y était comme ingénieur et cascadeur au même titre qu'Aymrald pour toutes les mises au points de nouveaux systèmes et habituer les joueurs à l'utilisation des nouveaux exosquelettes (fins et souples) à 1220 capteurs issus du rinnepallo.

. "L'ère des trolls" était sorti le 9 puis le 12 septembre, avec le succès que VTP espérait pour un gros divertissement plein de bêtes féroces. La semaine précédente, Erwann avait pu voir "La secte", avec comme acteur principal Ghislain Perrussel, recruté par VTP malgré sa petite taille (1m70) parce qu'il ressemblait à Tom Cruise, mais avec les yeux vert clair. Ce n'était donc pas un Emilianien, mais un acteur choisi pour jouer dans ce film décrivant une organisation ressemblant à la Scientologie (éradiquée de France au titre d'association de malfaiteurs, les enquêtes fiscales et d' "abus de faiblesse" en cours depuis bien avant l'ELR ayant été "désenterrées" et menées à terme ensuite) avec une ambiance évoquant le film "La firme". Ce n'était pas sous le label "Kerfilm" mais "Ubix".

. Dans Gamma, Thorgård portait toujours sur lui une petite caméra mécanique pour garder trace de ses exploits, en plus de celles, beaucoup plus sophistiqués, en infrarouge et stéréoscopie, équipant ses propres prototypes espions, films souvent projetés dans les cinémas allemand pour soutenir le moral du peuple, ce qui expliquait qu'il eût une certaine autonomie d'action déjà du temps d'Hitler et disposât de moyens financiers, malgré ses 22 ans (en 1942). Le survol de nuit à basse altitude de Londres avec un motoplaneur silencieux, filmé aux infrarouges (d'où la nécessité d'un système de réfrigération des magasins de films fonctionnant par cycle à absorption sur l'échappement du moteur, dérivé de celui d'une moto BMW tellement l'avion était léger) avait prouvé publiquement son savoir-faire et son utilité stratégique, plus dans les rôles d'espionnage aérien que dans les grandes batailles: il n'y avait pas de remplaçant pour concevoir et piloter ses mini-avions espions, inspirés par ceux des frères Horten mais en plus petit, en misant sur la réduction maximale du bruit et la stabilisation anti-vibration des caméras embarquées. Il avait dit une fois à son meilleur ami Wilfried (joué par Torbjörn, comme dans la version commencée avec Atte) qu'il préférait périr aux commandes d'un avion plutôt qu'assassiné, ce qui arriverait tôt ou tard, car il avait au moins comme ennemis tous ceux que son équipe avait éjecté du pouvoir, et il n'avait pas l'intention de vivre dans un bunker. Le choix de Thorgård par les putschistes venait de ce que c'était lui qui avait commis le plus bel attentat contre Hitler (et l'avait filmé depuis son avion), même si cela n'avait pulvérisé qu'un de ses sosies, et de l'évidence suivante: "le peuple suivra Thorgård, ainsi que la Luftwaffe: sans conditions, et si l'aviation suit, toute l'armée suit".

. Thorgård mourrait à 25 ans, en novembre 1945, parti au Valhalla des pilotes d'essais dans un bruit de tonnerre, onze secondes après avoir franchi le mur du son (ce qui n'était pas étonnant de la part de ce personnage), l'avion (prototype Horten 246, en V plus pointu que le 229, avec six réacteurs) n'ayant pas résisté à sa propre onde de choc: "il y avait des morceaux de l'avion et de lui éparpillés sur quatre kilomètres, dont aucun n'était plus gros qu'une pomme. Les caméras de bord et les films aussi ont été détruits". Le personnage entrait ainsi dans la légende avec la plus belle mort qu'il aurait pu s'imaginer, après avoir changé la destinée du monde en moins de trois ans. Certains, dans le film, se demandaient s'il n'avait pas pris délibérément ce risque parce qu'il estimait que son rôle était terminé, alors qu'il eût été possible de faire voler ce prototype par télécommande.
. L'attentat, la prise de pouvoir (avec une nouvelle "nuit des longs couteaux"), les premières apparitions publiques avec un long manteau-cape de cuir noir qui pouvait faire penser à Dark Vador ou à Matrix, l'arrivée en petit hélicoptère Fl 282 Kolibri (qu'il pilotait) ou en parachute "boomerang" pilotable, le tout accompagné de musique wagnérienne stéréophonique par des paires de hauts-parleurs fixés sur de grands mâts. Le Fl 282, lancé en 1942, dont pour le film une réplique volait réellement, était un petit synchropter: rotors entrelacés, à axes juxtaposés proches, légèrement inclinés vers l'extérieur pour permettres aux pales de l'un de passer par dessus le moyeu de l'autre et réciproquement. Les avions expérimentaux ne pouvaient toutefois être montrés à la foule, sauf si l'on était sûr que les espions alliés en savaient déjà plus que les actualités cinématographiques allemandes ne leur en apprendraient. Tout le décor et la foule seraient ajoutés en post-production, toutefois Erwann voyait sur un grand écran en arrière des caméras l'image d'une place pleine de foule avec en fond des immeubles pavoisés de drapeaux rouges à croix gammée inversée: elle avait changé de sens (partout) depuis l'accession au pouvoir de Thorgård. Il brandissait un livre appelé "Mein Werk" (mon oeuvre) qui décrivait et expliquait, avec de nombreux schémas, tout ce qu'il y avait à fairre, sauf ce qui constituait des secrets stratégiques. Derrière et au dessus de lui, le soir, des projections de films (faits par l'équipe ayant tourné la HF wagnérienne, d'une part, et par lui, pour les prises de vues aériennes) illustrant ce qu'ils disait. Le savoir-faire nazi en matière de propagande et de manipulation des foules avait été repris et amélioré, tout en ayant moins besoin de mentir ou de camouffler des problèmes que son prédécesseur. La propagande n'était pas oubliée pour autant, comme le discours enregistré en français dès la réussite de l'attentat, et diffusé par Radio-Paris, dans lequel Thorgård remerciait le Front Populaire français de sa collaboration intensive à la victoire nazie en refusant toute réaction militaire en 1936, "qui a offert à l'Allemagne la possibilité d'un réarmement complet sans le moindre contrôle étranger". Pétain et sa bande furent aussitôt limogés, pour mettre en place dix-huit petits gouvernements (en moyenne cinq départements chacun), la France étant désormais gérée en provinces et non en Etat centralisé: "cette formule monarchique n'est plus de notre temps: les décisions doivent tenir compte des particularités locales". En prime, l'Alsace et la Lorraine retournaient sous administration française (sous contrôle allemand). Les deux langues y seraient enseignées à égalité. Les régions sud seraient administrées par l'Italie, "pour le développement du tourisme et de ses infrastructures". Le discours en anglais remerciait les Etats-Unis d'avoir mis fin au versement par l'Allemagne des dommages de guerres consécutifs à la première guerre mondiale, "si les Français, les Belges et autres avaient continué à nous faire payer tout ceci, nous n'aurions jamais eu les moyens de nous réindustrialiser". C'était aussi mentionné dans son discours en français. Thorgård disait ainsi tout haut ce que beaucoup pensaient tout bas, contribuant un peu plus à rejeter la responsabilité de la défaite française les uns sur les autres, et en dédouaner les Français eux-mêmes: ça revenait à leur dire: "vous avez fait ce que vous pouviez, mais les dés étaient pipés: vous ne pouviez rien contre le Front Populaire et les Etats-Unis qui avaient décidé d'avance de vous sacrifier pour nous offrir la victoire". L'Etat français central était aboli, remplacé par les dix-huit gouverneurs provinciaux. Les langues régionnales (lorsqu'il en existait) seraient enseignées au même titre que le français, dans ces provinces. Thorgård rappelait aussi que l'intervention américaine n'avait comme objet que de se partager l'Europe avec Staline: "Roosevelt n'a engagé son pays dans cette guerre qui ne le concernait pas que par peur que l'ours soviétique dévore toute l'Europe jusqu'à l'Atlantique. Ne vous inquiétez pas, nous avons les moyens de le renvoyer en Sibérie".

. Thorgård avait rencontré Lindberg, qui était déjà pro-nazi et l'était plus encore depuis que c'était un jeune génie de l'aéronautique qui était au pouvoir en Allemagne.
. La propagande en Europe et aux Etats-Unis, doublée dans les diverses langues de diffusion, montrait aussi les camps d'extermination soviétiques: les goulags, survolés et filmés par des avions espions allemands. "Ce sont prétenduement des camps d'esclaves, mais quand on donne au gens une ration alimentaire qui permettrait tout juste de survivre sans rien faire dans un climat doux, tout en leur demandant des travaux de force par des températures fortement négatives, l'objectif est bien de tuer". Photos et films à l'appui, Thorgård expliquait que le communisme réel n'avait rien à voir avec la théorie de Karl Marx puisqu'il reposait sur la mise en esclavage de l'ensemble de la classe ouvrière au profit d'une petite élite d'apparatchiks: "c'est le système le plus féodal que l'humanité ait connu. Aucun paysan n'a le droit de posséder la moindre parcelle de terre".
. Les camps soviétiques étaient bien connus du régime nazi dès ses débuts (quand il n'en avait pas encore) puisque c'était sur le modèle du goulag, créé par Lenine et développé massivement par Staline, qu'Hitler avait conçu les siens, à ceci près que faute de temps, d'espace et d'un climat évitant la putréfaction des corps, il avait fallu improviser d'autres moyens de s'en débarasser. L'URSS avait participé à la chasse aux Juifs en Pologne, pour les livrer aux Nazis, allant jusqu'à fournir des locomotives et des wagons aux Allemands qui en manquaient. Un documentaire passé quelques années plus tôt sur Arte: "Hitler et Staline, les complices" l'avait rappelé, malgré la censure de gauche très puissante dans les médias français à l'époque. Selon Thorgård, c'était parce que Staline savait que cette obsession hitlérienne était un gros handicap pour l'effort de guerre allemand. Une des variantes du scénario initial était de transformer les champs de concentration en abattoirs industriels: au lieu de gaspiller les corps, en faire immédiatement (sans attendre leur amaigrissement) de la charcuterie pour les troupes du front de l'Est, ce qui rentabilisait la "solution finale" tout en permettant de mobiliser une partie des éleveurs, l'élevage devenant moins utile. Toutefois cela (surtout avec Atte au pouvoir) aurait trop fait allusion à "Viande Urbaine" et aurait nui à l'autonomie du film. L'objection restait valable avec Erwann à la place d'Atte.

. L'un des autres points forts de la stratégie de rupture de la collaboration américano-britannique par Thorgård avait été d'en "couper le cordon ombilical": dynamitage sous-marin des câbles transatlantiques au large de l'Angleterre, obligeant désormais à utiliser les communications longue distance par radio, beaucoup moins fiables (peu de lignes, sensibilité aux perturbations météo) et surtout pouvant être écoutées. A soi seul, cela faisait perdre au moins deux mois (estimaient les Allemands) aux Alliés dans l'organisation d'un débarquement. L'incapacité à l'époque des plongeurs de travailler à de telles profondeurs aurait imposé de crocheter le câble bien plus au large avec un navire équipé à cet effet, pour le soulever (d'où la nécessité d'en avoir une bonne longueur dépassant du crochetage pour qui ne s'en défile pas par son propre poids) et le raccorder en surface à un tronçon neuf stocké en bobine dans le navire. Le risque de se faire couler un tel navire était trop élevé, en plus de celui de voir les Allemands redétruire le câble, maintenant qu'ils savaient par où il passait: un sous-marin, lui, pouvait déposer "icognito" une charge suffisante pour le rompre alors que des ouvriers ne pouvaient pas descendre travailler. L'Angleterre ne disposait pas d'assez de sous-marins pour monter la garde au fond le long du câble. Le retour à l'efficacité de la guerre sous-marine, grâce au concept sans bruit d'hélice (puisque sans hélice, en plus d'une doublure de "peau" en néoprène amortissant les échos des détecteurs acoustiques contre la coque) d'Elmeri Lokinen, et l'utilisation de bombes volantes guidées par des émetteurs radio (d'origine, sur la trajectoire de la cible, ou ajoutés par une taupe au bon moment) pour aller frapper des organes vitaux de l'effort de guerre des deux pays (en particulier des usines de roulements à billes, équipement non militaire mais indispensable à presque toutes les fabrications mécaniques terrestres, aériennes ou navales, idem pour les composants électroniques indispensables aux télécommunications et aux radars) achevait de donner le temps au "second nazisme" (celui dont la svastika tournait dans le sens indien) de finir la mise au point du Me 262 (premier vol le 18 juillet 1942, réacteurs à améliorer), les V2 (en plus de pouvoir les lancer de plus près, la France restant occupée), puis le Horten 229 indétectable par les radars de l'époque.
. Thorgård avait dès novembre 1942 l'idée de remédier au manque de puissance au décollage du Me 262 par catapultage (treuil mû par des moteurs électriques de locomotive, fournissant bien plus d'accélération à partir de l'arrêt qu'un système à hélice ou plus encore à réaction) et de l'acceuillir façon porte-avions aussi, en combinant deux parachutes de freinage et une crosse hapant des câbles à déroulement freiné. Ceci permettait l'utilisation d'une piste courte cachée dans une sorte de tunnel d'autoroute (puisque large) sous une coline, mettant le prototype à la fois à l'abri des regards et de bombardements éventuels. Le tout ressemblait à un chantier d'autoroute abandonné, placé à un endroit où la réalisation d'une nouvelle liaison aurait pu être utile, pour plus de réalisme. Plus tard elle fût achevée, mais seuls des véhicules participant au projet (d'aspect civil, toutefois) y circulaient, prévenus par radio de se ranger de part et d'autre si un avion était sur le point de s'y poser. Il fallait un peu de circulation pour que l'on ne soupçonnât pas que cette voie avait un autre usage. Le même procédé fut utilisé pour le Horten 229 furtif.

. Moyennant le catapultage (lui permettant de décoller bien plus court qu'un chasseur classique, alors que sans, c'était l'inverse), le He280 et le Me 262 purent être produits en petite série opérationnelle au combat dès octobre 1943 (même si les réacteurs n'étaient pas tout à fait fiables) et armé de roquettes (comme dans la réalité il le fût plus tard) pour remédier au problème du manque de temps pour viser un bombardier ennemi, en raison de la différence de vitesse. Des bases du même type construites en France (version aérienne des hangars à sous-marins de Lorient) rendirent possible des raids sur l'Angleterre. Les premières bombes volantes pilotées (à capsule séparable) allaient lui succéder dans cette tâche, avant les progrès en précision des bombes volantes entièrement automatiques.

. La séquence de film de HF (2mn 30 à l'écran, au tout début du film) où Siegfried combattait le dragon avait été bien jouée cet été (on n'avait pas donné à Knut un modèle de mauvais jeu à imiter, contrairement à ce qu'Erwann avait entendu dire initialement) et le dragon n'était pas ridicule tant que la commande de ses yeux ne se bloquait pas. La scène était tournée en forêt: à l'époque, l'incrustation virtuelle de décors n'était pas possible. Lors des réparations, on voyait que les opérateurs du dragon travaillaient dans une fosse recouverte d'où sortaient avec des périscopes articulés. Thorgård (le vrai Atte, là) participait aussitôt aux réparations de la machinerie, sans que le public sût déjà, à ce stade, qu'il était ingénieur aéronautique, tandis que Knut se changeait: ceci augmentait leur ressemblance "vite vus".

. Thorgård s'envolait ensuite avec un tout petit bimoteur en forme d'aile volante (dont les hélices étaient situées en arrière de la voilure: encore une version réduite et allégée d'un modèle Horten) depuis une route forestière étroite, obligeant à savoir bien viser pour passer entre les frondaisons. On se rendait compte un peu plus tard que c'était lui qui les fournissait en pellicule, puisqu'il pouvait en avoir facilement (couleur, haute sensibilité) pour les prises de vues aériennes, malgré le rationnement de presque tout en 1943. Les prises de vues aériennes pour le cinéma lui servaient de couverture pour ses activités d'espionnage, car sous prétexte de prises de vues aériennes de certaines scènes tournées près des frontières (comme par hasard) il pouvait ensuite utiliser les avions insonorisés "pour ne pas gêner le tournage" pour partir en vol de nuit en utilisant les films infrarouges et leur système de réfrigération embarquée. Cela servait aussi aux conspirateurs à bien repérer les circonstances favorables pour l'attentat contre Hitler, puis le second, le premier n'ayant éliminé qu'un sosie, comme le confirmait l'espionnage au Berghof par pose de mouchard plus loin sur la ligne téléphonique, sous prétexte de réparation d'un poteau victime de la chute d'un arbre.
. Il y aurait juste "visa d'exploitation n°#####" au démarrage, puis le spectateur était aussitôt plongé dans une nuée de bombardiers américains partout autour de la "caméra" (tout était virtuel, bien sûr, et stéréoscopique) déversant un tapis de bombes sur... La France ou l'Allemagne? Non précisé à l'image. Des chasseurs allemands (Me109, surtout) s'y attaquaient, quelques dizaines de B17 étaient incendiés ou mis en perdition au cours de cette scène, mais la Luftwaffe essuyait beaucoup de pertes sans avoir réduit significativement l'offensive américaine. Ca permettait d'ouvrir le film avec une "énorme" scène d'action (des avions partout dans le ciel, "comme si on y était" mais avec une qualité d'image bien supérieure à celles des actualités de l'époque), d'où un rendu stéréoscopique à couper le souffle. C'était filmé de l'extérieur comme de l'intérieur des divers avions, comme les films réels d'époque.
. Suivait alors (zapping) la scène de tournage avec le dragon. On assisterait un peu plus tard au vol de nuit, avec de longues parties planées, moteur coupé (il était soigneusement insonorisé, les échangeurs d'échappement de la réfrigération à désorption des magasins de films infrarouges y contribuant aussi, mais pas 100% silencieux), dans la capitale anglaise, avec un autre prototype à vol lent et silencieux.
. VTP avait aussi tourné à l'ancienne des extraits de "La nuit des Drakkars" (trois minutes), et un "remake" d'Alexandre Nevsky dans lequel les chevaliers teutoniques gagnaient, ces deux films étant censé avoir été tournés (avec Knut) avant "Siegfried" avec l'aval et les subventions du régime. "La nuit des drakkars" avait été le deuxième, tourné en Norvège début 1943 puis en Normandie pour aller faire des raids d'espionnage aérien de nuit sur l'Ecosse puis l'Angleterre. C'était rapidement évoqué dans un flashback. Les scénarii des deux derniers étaient moins idéologiques, après que le metteur en scène eût fait ses preuves via le premier.

. A un moment lors de l'organisation d'une cérémonie officielle, Hitler disait à son sujet, quand le nom Thorgård était évoqué parmi les invités prévus: "retirez-le de la liste. S'il n'a rien d'autre à faire ce jour-là, envoyez-le filmer les Alpes en relief ou n'importe quoi qui fasse de belles images aux actualités". Cela suggérait qu'il souhaitait l'éloigner des lieux et gens de pouvoir, tout en ne niant pas son utilité à la fois stratégique (espionnage aérien) et de propagande (documentaires en relief "à couper le souffle").

. Erwann trouvait le film intéressant (il connaissait l'essentiel du scénario) mais pensait qu'il n'aurait pas un succès à la hauteur des moyens mis en oeuvre: tout ceci allait coûter cher, car il fallait reconstituer de l'ambiance d'époque dans plusieurs pays, des usines entières, etc, tout en n'étant pas un thème aussi facile à vendre que "l'ère des Trolls", par exemple, typique du gros film d'action défouloir que l'on allait voir sans la moindre préoccupation de vraissemblance.

. Il travailla beaucoup plus que demandé sur le robot imitant Atte. La partie apparence était du ressort des modeleurs et maquilleurs "de machines" de VTP, qui en avaient grande expérience. Ce fut à l'optimisation de l'asservissement du robot à l'exosquelette (et vice-versa: retour d'effort) donc la gestion des capteurs équipant l'un et l'autre qu'Aymrald (puisque là, c'était l'ingénieur et non l'acteur) participa le plus, ainsi que la programmation "réseau neuronal" de la logique "floue" de choix des mimiques sans jamais tomber dans la caricature "imitateur comique singeant Atte": faire vivant, spontané, mais sobrement. Les progrès de ce robot permirent à VTP d'augmenter un peu le nombre de plans dans lequel il jouait, plutôt que l'Atte entièrement virtuel: avoir un robot matériel face à eux simplifiait surtout le travail des autres acteurs, même si ceux de VTP avaient une grande habitude du "jeu face au vide" après répétitions avec lunettes virtuelles peuplant ce vide comme dans le film final (mais à un niveau de détails moindre, type "simulateur de qualité militaire" et non "photoréalisme" permettant un rendu "temps réel").
. La nécessité d'être synchrone face au vide (pour les scènes dans lesquelles il n'y aurait pas moyen de garder les lunettes virtuelles lors du tournage réel, contrairement à ce que pouvaient facilement faire les soldats ayant des masques à gaz, par exemple) était une épreuve de sélection supplémentaire des acteurs de VTP pour les grosses productions utilisant intensivement la synthèse, pas uniquement pour les décors "plus loin" mais aussi pour "l'interactif proche". La robotique matérielle ouvrait ces rôles à plus d'acteurs (et non aux virtuoses de l'insertion synchrone "en aveugle"), permettant des emprunts à des séries du groupe pour renouveller les personnages. S'il n'y avait pas eu ce problème (pas tant d'acteurs "synchrones dans le vide" que ça, surtout pour les films ayant beaucoup de personnages appelés à participer de temps en temps à de telles scènes) VTP aurait bien plus utilisé la synthèse dans les grands "Kerfilm". L'investissement de qualité "CRNS" (voire "labos japonais") dans la robotique interactive réaliste avait surtout lieu en raison de la présence d'acteurs humains: "quand on n'aura plus besoin d'acteurs vivants, on ne fera pas tout avec des robots car alors ce sera encore plus simple de tout faire en virtuel". Restait toutefois le coût très élevé de la virtualisation de certaines scènes naturelles (végétation, effets d'eau, etc) où la robotique (animaux réels ou chimériques) pouvait s'avérer plus rentable que le virtuel, dans l'état actuel de la puissance de traitement des ordinateurs, surtout depuis que les robots de cinéma de VTP avaient atteint une souplesse et un "naturel" de mouvements leur évitant de se "trahir" comme tels. Cela ne signifiait pas qu'ils eussent les aptitudes réelles de ces animaux, mais qu'ils pouvaient les simuler fidèlement dans des successions de mouvements connues d'avance, que leur cybernétique n'aurait qu'à corriger légèrement (et non improviser entièrement) en fonction des petits décalages temporels et spatiaux entre les positions réelles et simulées des autres composants de la scène. Une araignée artificielle de la taille d'un sanglier pouvait monter rapidement et efficacement le long du tronc puis des branches d'un arbre réel parce que la géométrie de l'arbre avait été entièrement modélisée dans le système comportemental et les scénarii de parcours testés (en virtuel, puis en réel) avant de lancer la tarentule géante à l'assaut de l'arbre dans le tournage réel. Elle n'aurait pas eu une telle aisance (voire se fût arrêtée et aurait reculé suite à une "impasse", pour essayer d'autres mouvements voire un autre passage) si on l'avait envoyée escalader un nouvel arbre sans répétitions préalables. Il en allait d'ailleurs de même pour les cascadeurs humains (que ce fût chez VTP ou ailleurs): savoir d'avance où poser les pieds, ou reprendre appuis, se suspendre, se balancer, sauter, etc dans un parcours d'obstacles hauts et complexes rendait la scène facile à tourner et sans risques. De plus les éléments les plus "contondants" d'apparence, près des passages où une maladresse pouvait occasionner un gros déport ou une chute, étaient faits de matières molles n'en ayant pas l'air, ou étaient ajoutés en post-production. Les robots "réels" facilitaient aussi le tournage des affrontements au "corps à corps": ceux-ci étaient les plus difficiles à jouer face à du vide, faute de pouvoir prendre appuis sur un adversaire matériel, en plus de devoir se souvenir fidèlement de sa position à chaque instant. Les chiens artificiels ("Cave canem") s'étaient ainsi avérés indispensables au tournage des scènes d'assauts canins, scènes trop dangereuses (estimait VTP) avec de vrais chiens même bien dressés (ou alors un spectateur attentif verrait que l'homme et le chien étaient en train de jouer, et non de se livrer un combat à mort), en plus de ne pouvoir avoir la précision requise ni permettre à l'acteur humain de frapper la bête sans retenue, ce qui devenait possible si c'était un robot. De plus, l'endroit frappé à main nue pouvait être plus souple que s'il y avait réellement eu de l'os dessous, d'où la possibilité d'y porter de grands coups sans se meurtrir. Les épanchements de tripes suite à une éventration en plein combat (que ce fût par les dents de l'animal ou une arme blanche tenue par l'humain) étaient aussi facilités par l'utilisation d'un voire deux robots. "Cave canem" avait reçu quelques récompenses dans des palmarès de trucages pour l'utilisation de chiens mécaniques d'un réaliste dans l'agressivité, d'une bestialité et d'une réactivité que l'on n'aurait même pas pu obtenir à ce point de chiens dressés. Même motif, même récompense pour les chevaux artificiels de l'assaut des drakkars par les cavaliers bretons dans "Drakkars et dragons". En comparaison, ce qui était demandé au faux Atte semblait bien plus simple, mais justement, comme c'était plus simple, le spectateur pourrait mieux l'observer qu'un pitbull dévorant frénétiquement un entrejambe ou qu'un cheval sautant dans un drakkar en défonçant les "bancs de nage" ou une partie du bordé à clins. Thorgård restait toutefois filmé "à la Erwann d'Ambert", c'est à dire en privilégiant les scènes d'action sur les scènes de "théâtre filmé". C'était dans ces dernières que l'on utilisait le plus souvent le robot. Toutefois, dans l'atelier, surtout quand on ne voyait que ses mains et des parties de bras au travail, c'était le vrai Erwann, car faire faire la même chose au robot prenait plus de temps de préparation.

. Un film à la fois très "ingénieur" (on assistait à la fabrication de prototypes), avec beaucoup de vues aériennes (et pour cause), profusion de scènes d'action militaires (surtout en l'air et en mer, mais parfois aussi au sol) mais aussi des intrigues ministérielles ainsi que les parties sordides et pas du tout amusante d'une guerre, la préparation bien plus intéressante de divers attentats contre Hitler (plusieurs étant fidèles à la réalité historique), y compris celui, superbe, de Thorgård (non identifié. Il avait déclaré le vol du prototype deux jours plus tôt), mais hélàs inutile, sauf pour dissuader le dictateur de quitter son "nid d'aigle" où la bombe volante modifiée par Thorgård et ses copains ingénieurs aéronautiques le pulvérisait, après l'avoir eu au téléphone (numéro obtenu en espionnant la ligne téléphonique de Göring) pour être sûr qu'il fût dans la cible, au moment de la faire exploser. Thorgård n'était dans le même lieu qu' Hitler qu'une seule fois, dans le film, lors d'une visite chez Messerschmidt, en descendant d'un prototype qu'il venait de tester. C'était un autre membre du régime qui venait échanger quelques mots avec lui, et non Hitler. Hitler était joué par un robot bien plus souvent que par un acteur repris en infographie pour lui ressembler "autant qu'une photo d'époque". Beaucoup de dignitaires nazis de l'histoire réelle resservant dans cette histoire-fiction étaient eux aussi des robots (ou de la "bidouille" virtuelle) permettant d'obtenir une ressemblance "aussi fidèle que celle des répliques de voitures ou d'avions", contrairement à ce qui eût été le cas avec des acteurs humains même bien choisis. L'abondance de documents cinématographiques d'époque permettait aux robots (et aux sosies virtuels) d'être fidèles à la gestuelle et au jeux d'expressions instictives (ou voulues: peu importait) des personnages historiques, au point que seules la qualité "VTP" de l'image et la stéréoscopie permettaient de voir que l'on avait pas inséré dans le tournage des documents réels (comme cela s'était fait dans d'autres films de guerre) mais réussi une reconstitution fidèle de ce qui devait l'être dans un contexte, qui, lui, évoluait autrement.

. Ce fut le 23 puis le 26 septembre 2001 que "Le drakkar fantôme" sortit en salles, dernier inédit des films dans lesquels Erwann avait joué en 2000. "Les miroirs du temps" était passé à la télévision pour permettre au grand public d'y goûter: ça pouvait inciter plus de monde à aller voir le suivant. VTP ne le prêtant que rarement pour des interviews (la Finlande en étant la cause officielle), dans lesquelles il ne parlait pas trop (les questions étant filtrées), les médias n'avaient pas grand chose à dire sur Erwann sur ni surtout à faire dire par ce personnage par des parodistes: il n'offrait rien d'intéressant, sauf indirectement, via VTP ou BFR qui étaient des cibles faciles, mais des personnages déjà bien plus médiatisés comme les Småprat, les Bifidus (même si le groupe avait moins de couverture médiatique que par le passé) et nombre d'acteurs de séries (dont Emiliano) offraient bien plus d'anecdotes, phrases extraites d'interviews et même quelques histoires d'alcôves ou d'alcool. Ce qui par contre pouvait facilement être un sujet de plaisanterie, c'était l'avanlanche de films avec Erwann d'Ambert: même si Zhao et quelques autres étaient eux aussi présents dans beaucoup d'entre eux, ils détenait pour le moment le record, chez VTP+VTPSF, et ceci souvent parmi les rôles principaux. De plus les observateurs attentifs ayant quelques informations sur VTP et BFRSF (plus difficile) avaient constaté que les tournages étaient "factorisés" en fonction des périodes de présence de cet acteur en France, d'où les tournages en rafales suivis de sorties bien plus espacées. Quelques infos (déjà un peu connues) comme, dans une émission de radio: "ils ont une astuce pour diversifier le jeu d'un même acteur: ils doivent imiter les modèles de comportements et d'expressions enregistrés par d'autres, lors de la préparation du film, et pas toujours les mêmes sauf quand ils reprennent le même personnage, donc si vous voulez savoir comment joue Erwann d'Ambert de lui-même, essayer de retrouver pour qui d'autre il a préenregistré et observez-les dans leurs rôles, sachant qu'il l'a fait pour Rahan, dans le dessin animé. VTP a aussi des acteurs qui ne servent qu'à ça: ceux qui ne passeraient pas bien en stéréoscopie ou qui ne leur plaisent pas physiquement, mais qui ont jeu intéressant, donc ceux-là, vous ne les verrez généralement pas dans les films, en échange de quoi ils ont le temps de préenregistrer pour beaucoup d'autres. Il y a aussi des modèles de comportements synthétisés directement par logiciel, de plus en plus, donc il est très difficile de s'y retrouver". Anectode plus ludique: "quand on va dans les bureaux de VTP de La Défense, on croise des statues en métal grandeur nature, dans les couloirs où certains paliers: ce sont leurs acteurs, sculptés à la machine à commande numérique à partir de leurs clônes virtuels. Parfois il y en a plusieurs du même, comme souvenir de tel ou tel rôle. J'ai vu quatre Erwann d'Ambert différents, mais je suppose qu'il en existe plus".
. La technique utilisait l'équivalent de la "cire perdue" pour fraiser un matériau bien plus tendre (et permettant aussi des ajouts par collage à basse température), remplacé ensuite par l'alliage d'aluminium (pour jantes ou moteurs) dans le moule en ciment (surchargé en sable très fin, donc facile à casser voire émietter ensuite) réalisé d'une pièce autour, éliminant tout problème de dépouille, une machine de finition se chargeant ensuite des petites retouches pour mieux imiter ce que le matériau de moulage ne rendait pas assez finement. Une technique classique pour le prototypage numérique de pièces dans l'industrie.

. Les scènes de "Gamma" utilisant Thorgård avaient été tournées surtout fin août et début septembre, pour pouvoir commencer le plus tôt possible la post-production. L'essentiel du coût du film était occupé par les battailles, qui ne nécessitaient pas d'acteurs réels sauf pour quelques scènes brèves (déjà tournées).
. VTP considérait Erwann essentiellement comme un acteur de HF (et SF) faisant aussi d'autres rôles, l'étiquette acquise dès "Les miroirs du temps" n'étant pas prête de se décoller. Viande urbaine était déjà un "film culte", mais dont le personnage principal était joué par Atte, Erwann y ayant un second rôle plus réservé quoique fort actif). Les films "contemporains réalistes" ne seraient jamais les plus nombreux, ou alors il s'y passerait des choses sortant nettement de la réalité quotidienne, comme "Disgénisme". Il avaient depuis 1999 (en fait ça venait de VTPSF) un projet vaguement (pour éviter tout plagiat) inspiré de "peur sur la ville", au départ, en partant du thème de l'oeil, mais remanié ensuite pour en faire un serial killer collectionnant les yeux de ses victimes dans des tubes de verre remplis d'un liquide conservateur animé de mouvements faisant monter et descendre les yeux comme des ludions. Il était prévu d'y utiliser Erwann (originellement Atte) à son retour en Finlande. Entretemps des effets spéciaux avaient été peaufinés, ainsi que le scénario, pour éviter que ce fut trop "gros gore qui tache", car bien que ce genre eût un vaste public, il était peu compatible avec un thriller d'angoisse comme la définition initiale du projet. Des scènes gores subsisteraient, mais très brèves, ce qui aurait même plus d'impact, donnant l'impression au public que par décence (ou pour ne pas être interdit aux moins de 18 ans dans certains pays) on était passé vite sur ce que l'on n'aurait pas osé monter plusieurs secondes. Pourtant, dans Sartilvar, les grouillements de vers dans les blessures n'avaient pas été éludés et le film n'avait pas été excessivement restreint d'accès (par âge) pour autant.
. Torx avait confirmé au public les qualités de jeu d'Atte, qui pouvait être inquiétant derrière son côté plus "schtroumpf farceur" qu'Erwann, de sorte que c'était le Breton qui semblait le plus finlandais des deux, dans ce film comme dans "Viande urbaine". Dans Gamma, VTP avait jugé (Erwann n'ayant eu en fait qu'à enfoncer une porte ouverte, en le suggérant) que c'était trop "attéifier" Thorgård et que la redéfinition partielle du personnage le rendait plus crédible comme "d'origine suédoise", alors que ce qui avait été conçu du temps d'Atte était trop "Bavarois". Erwann avait eu à jouer un Thorgård plus froid, plus technique et moins présent, sauf dans les scènes héroïques qui en avaient profité pour lui en demander un peu plus qu'à Atte. Ce changement était progressif: l'aviateur-inventeur techniquement sérieux mais plutôt désinvolte (en tout cas assez insousciant) du début, plus "attéen", devenait de plus en plus suédois d'attitude au cours du film, mais sans renoncer à son goût de l'aventure aéronautique personnelle qui allait lui être fatal (mur du son) et en même temps l'envoyer dans l'esprit du peuple au Valhalla des chevaliers du ciel: un bang supersonique, une légende. Hitler, lui, avait vite été oublié et même foulé au pied: le symbole le plus marquant de la deshitlérification du nazisme (qui restait toutefois raciste, eugéniste [Lebensborn] et conquérant) était l'inversion du sens de rotation de la croix gammée, retrouvant son sens d'origine indien, qui avait une signification bénéfique. C'était ça qui avait donné l'idée du titre du film. D'ailleurs sur l'affiche, on verrait la croix gammée inversée, tout au fond d'un ciel de feu, précédé d'une nuée d'avions. Dans le film, on voyait les travaux d'inversion partout: scuptures modifiées ou supprimées et refaites, drapeaux réimprimés sur l'envers, découdre et recoudre l'emblème sur les uniformes... Au début, il avait même été envisagé de remplacer le rouge par le vert, mais esthétiquement on garda le rouge, d'autant plus que de ce fait, beaucoup de gens ne réaliseraient pas tout de suite que le sens de rotation avait changé, puisque même des néo-nazis faisaient parfois l'erreur dans leurs tags (toujours la même erreur pour le même tagueur). Thorgård avait profité des "sieges éjectables" installés par Hitler autour de lui pour éliminer une grande partie de l'ancien entourage, dont les homos qui n'était pas déportés, puisque l'on ne gaspillait plus de trains pour ça, ni exécutés mais (ce que Thorgård estimait plus efficace en terme de communication: "ils ne valent même pas une balle") déchus publiquement de la nationalité allemande et donc des droits civiques, ce qui était l'occasion de souligner l'hypocrisie et la "souillure" tolérée par l'ancien dictateur chez ses sbires les plus proches donc achever de discréditer sa mémoire. "Une Allemagne plus propre et plus forte". Plus propre: les mesures anti-tabagiques hitlériennes étaient conservées puis amplifiées (prohibition totale: trois mois de travaux forcés pour tout contrevenant, quelque fût son âge, un an en cas de récidive) ainsi que les mesures de protection de la nature. Toutefois, Thorgård n'était pas végétarien: saumon à tous les repas, importé par avion (pour sa conso perso et celle de ses camarades, pour une fraîcheur optimale) de la Norvège conquise, et à l'époque, ce n'était pas du saumon d'élevage gavé de farines animales.

. Après son retour en Finlande, les autres scènes de Gamma pourraient être tournées à distance via VTPSF pour tirer partie de ce qui ne serait disponible que plus tard en Finlande, en particulier les répliques de sous-marins à queues d'Elmeri Lokinen, et où il piloterait le robot à l'image d'Atte. Stéphane avait reconnu beaucoup de Finlandais (et des Finlandaises en moins grand nombre) jouant les rôles annexes d'Allemands (parfois aussi les Russes et de quelques Américains) dans Gamma, d'autres personnages étant créés par ordinateur: quand on avait besoin d'un bataillon de SS, seuls les plus proches de la caméra devaient être réels. Ils pouvaient même être eux aussi virtuels, s'il y avait un peu de fumée d'explosion, de poussière de passage d'un char ou autre polluant visuel évitant d'aller faire une synthèse "jusqu'aux pores de peau". VTP n'avait pas fini de tout construire, loin de là, d'autant plus que priorité était donnée aux films pouvant être tournés entièrement en septembre. Quand à la post-production, elle "mettait le paquet" sur "Le crépuscule de Rome", en profitant de ce qu'énormément de pré-production avait pu être faite avant août. VTP et Tarsini voulaient ce film pour décembre, "sans bâcler le moindre pixel". S'il fallait mettre en attente les autres post-productions, ce serait fait. En principe, il y avait la puissance pour terminer d'autres films cette année. Le "porte-avions" de la rentrée (en France, du moins, puisque c'était désormais début octobre) était sorti fin septembre: "Le drakkar fantôme". Parmi les critiques ironiques:
. "si vous avez aimé Erwann d'Ambert en mort-vivant dans Tarsilvar et s'il vous a plu en Viking dans drakkars et dragons, alors vous allez adorer le drakkar fantôme où il joue un mort-vivant viking".
. Pour "l'ère des trolls":
- Si vous ne croyez toujours pas au trolls après avoir vu "La prisonnière des trolls", Kerfilm vous donne une deuxième chance avec "L'ère des trolls", où il débarquent dans notre monde d'aujourd'hui, bien plus rapides, gloutons et féroces. L'elfe joué par Erwann d'Ambert dit que ce sont des "trogues", ce qui prouve qu'il n'a pas lu le titre de son film.
. 0016: Alliage désentropique
- l'agent 0016 ressemble de plus en plus à l'homme qui valait trois milliards mais l'intrigue scientifique et commerciale sous-marine renouvelle agréablement le thème, même si c'est surtout un moyen d'économiser sur le coût de production des images: les étendues d'eau noire des profondeurs ne coûtent rien à calculer.
. César et les Vénètes:
- contrairement à ce que vous pensiez, il restait encore des bateaux à casser chez Kerfilm après leurs grands péplums grecs et vikings, alors on ôte les boucliers des drakkars pour en faire des navires vénètes, on réimmatricule à Rome les galères grècques, et nous voilà reparti pour de belles batailles navales comme vous en redemanderez encore. Vous ne connaissez pas les Vénètes? Aucune importance: vous connaissez au moins les Romains.

. Ce n'étaient ni les drakkars ni les galères grècques qui avaient resservi, mais peu importait pour l'auteur de l'encadré, qui ne le savait peut-être pas.

. Cave canem:
- les mille et une manières de tuer un molosse féroce qui est en train de vous broyer la jambe jusqu'à l'os. Ames sensibles s'abstenir, que vous aimiez ou craigniez les chiens.

. Les giboyeuses:
- pléthores de prothèses et moignons dans la population, mais cette fois ce ne sont pas les taupes de Sartivlar, mais des machines à viande dotées d'une intelligence artificielle collective. Utopique mais néanmoins effrayant de "rendu réaliste" à l'image.

. Troglodia:
- puisqu'il y a de la masse moins pesante, pourquoi pas anti-pesante? Fourrez ça au centre d'une planète encore molle et chaude, et la voilà soufflée en croûte pour permettre d'habiter les deux faces, une fois refroidies. Mais si, c'est possible...

. Torx:
- rock, drogue, alcool, tuning et braquages de banques: un film très finlandais, mais rapide et musclé: du VTPSF.

. L'Odyssée:
- enfin un gros Kerfilm plein d'action et d'effets spéciaux sans Erwann d'Ambert! Mais si, c'est possible. Les Grecs ont tous les cheveux raides comme des Chinois, infographie oblige, mais à part ça, l'ambiance y est, et l'on attend avec impatience la sortie de l'Iliade, tournée cet été aussi.

. L'Iliade:
- Ulysse sans le collier de barbe = Hector, donc c'est Vittorio Cario qui rempile, sans se ménager. Tarsini a librement élucubré les fortifications troyennes, les battailles sont généreuses, et l'oeuvre originale assez bien respectée.

. Traction:
- encore un film avec Vittorio Cario. Un "road movie" plein de voitures d'époque et de grosses mitraillettes. Les gansters semblent un peu trop jeunes, étant piochés dans l'effectif habituel de VTP, mais savent le faire oublier dans l'intensité de l'action.

. Retour en Finlande de Stéphane, ainsi que des autres emprunts à VTPSF comme Mika, qui avait joué dans Serranix, certains étant déjà rentrés après un rôle plus bref, dans Gamma, Serranix, "Phytoclônes" ou autres, en plus de ceux ayant joué seulement dans des productions d'août: l'île ingénieuse ou "Le crépuscule de Rome", Cyberlander n'ayant pas besoin d'importer de petits rôles finlandais. Ronronnements, pétrissage, coups de tête sous le menton: Gorak.

. 43 films de tournés (il ne comptait ni Yaganda ni Alvéole 75 car il y aurait d'autres sessions, la prochaine servant aussi à tourner le film de nouilles carnivores. Y avait-il des "nanars" dans le lot? Peut-être "Digestion", mais il avait bien marché: déjà 68 millions d'entrées dans le monde. "La cinquième équation d'Otuscezwsky" qui lui semblait un film plus intelligent et avec des scènes d'action plus variées n'en avait fait que 51 millions, à ce jour. Certes, c'était loin des 286 millions d'entrées totalisées à ce jour par "les "Miroirs du temps", et des 237 de sa suite, mais à l'échelle du cinéma habituel, 51 millions d'entrées, c'était déjà un beau score. Même les 32 millions d'entrées de "La citadelle des goules" (récemment sorti à la télévision) auraient contenté bien des producteurs français. "Dent pour dent", "Revanche nocturne" et "les maîtres du fer" étaient passés à la télévision cette année, où "Castel mortel" avait aussi été rediffusé. Sa première HF, avec moins de moyens mais du rythme et de beaux effets spéciaux car il ne s'agissait que d'un téléfilm, donc tourné en 1250 lignes (chez VTP) donc ayant un coût de synthèse faible par rapport à du 5000 lignes en format large: les ordinateurs de VTP de l'époque (ceux achetés avec les recettes de "Cap sur Mars" et ayant servi dans la troisième saison de cette série) pouvaient assurer la post-production d'une bonne HF en 1250 lignes, alors qu'il allait fallu attendre près d'un an de plus avant d'avoir l'arsenal informatique pour engendrer "Les miroirs du temps" en définition cinéma.

. Le lendemain Stéphane passa chez Timo où il rencontra Nelli recoiffée "pluie fractale mordillant les yeux et les oreilles".
Nelli- la piscine est cassée, depuis hier.
Timo- la chaude: pas l'autre.
N- si je vais à la piscine, ce n'est pas pour avoir froid dans l'eau.
Stéphane- qu'a-t-il pu arriver?
N- le bassin s'est fendu. Le terrain se serait plus rétracté à un bout qu'à l'autre sous le poids de l'eau, dit-on.
T- sur cent mètres de long, il est plus difficile de garantir un sous-sol homogène. La fosse de plongée pèse bien plus lourd sous elle que le reste: c'est juste avant elle que le bassin s'est fracturé.
S- ça a peut-être un rapport avec la température: elle chauffe le sol sous elle, par rapport à ce qu'il y a autour.
T- oui: au plus fort de l'hiver, ça peut créer des variations de fermeté.
S- est-ce grave? Si le mouvement a cessé, il suffit de recimenter les fissures et de refaire une partie du revêtement.
T- justement: ils veulent attendre de voir si ça bouge encore, surtout qu'en la remplissant, après avoir réparé, ça peut créer un nouveau mouvement.

. S'observant, chez lui, Aymrald vit qu'il n'avait pas pris de "pli cutané", grâce au planning si chargé de septembre. Gorak qui était venu voir ce qu'il faisait, debout devant cette porte à glace. Gorak était un excellent antidote contre le narcissisme: dès qu'il le vit, il se trouva un peu bête de s'observer ainsi. Gorak était tellement plus beau! Toutefois lui aussi prenait grand soin de sa fourrure, bien plus souvent par jour qu'Aymrald... Plus narcissique qu'un chat? Deux chats.
. Bien avant l'épisode du camion de bois, il avait toujours eu la pensée qu'il pourrait être obligé de sortir de son lit en catastrophe pour affronter un danger, ou même se réveiller totalement ailleurs, en pleine brousse, ou à une autre époque. Il n'aurait jamais eu l'idée de dormir nu: quelle vulnérabilité! Comme un escargot sans coquille. Si au moins le corps humain était doublé de partout d'une épaisse fourrure d'ours... Ou même de certains singes comme l'orang-outang: ça, c'était du manteau de fourrure. Or les gens qui avaient des poils n'avait que de quoi les enlaidir, et non s'en habiller. Il n'aurait pas réussi à s'endormir nu, sauf dans un bain chaud, peut-être, l'eau donnant une illusion tactile de protection. Il préférait aussi n'entrer dans la nuit qu'avec quelques accessoires de survie: couteau suisse, montre à bracelet à effet Pelletier inverse, lampe solaire (ou plus récemment à manivelle). Il n'avait pas toujours eu la montre dans son lit, mais le couteau suisse sous l'oreiller et la lampe près de lui, oui. Lampe qu'il n'avait toutefois pas retrouvée lors de l'accident du camion, puisqu'il avait été ejecté du lit. Cet incident lui avait prouvé que son angoisse "ancestrale" était fondée: on pouvait être attaqué dans son lit, y compris par un camion de troncs traversant le mur (ça, il n'y avait pas pensé avant, par contre) donc se retrouver en plus sans maison autour de soi: juste des ruines ouvertes au vent, à la neige, et à la nuit. Ce rève, il l'avait maintes fois refait, de même que le nauffrage du ferry. Les anciens rêves pouvaient faire penser à la BD "Max et les maximonstres" (qu'il ne connaissait pourtant pas): se réveiller sur son lit, mais au milieu d'une forêt, d'une jungle, d'une usine abandonnée, avec l'angoisse de ce qui pouvait arriver ensuite. Le pire était quand le lit était sur les rails d'une immense gare de triage, la nuit, avec la lumière à la fois crue et insuffisante des tubes fluo de quais éloignés. Trop éloignés: des rails partout, impossible d'y échapper, et des wagons dévallant vers lui (le manquant, au début, mais visant de mieux en mieux...) sans bruit de moteur, juste la rumeur sourde des roues sur les rails et les crissements des aiguillages (ou freins de voie?). Mais qu'était tout ceci par rapport à un vrai camion défonçant vraiment la maison et l'éjectant de son lit en pleine nuit, neige, décombres et vent? L'attentat à la grenade lors d'un buffet de BFRSF, le coup de ski derrière l'oreille pendant qu'il faisait de la luge: il pensa que de telles agressions (volontaires ou fortuites) n'auraient pas eu lieu en France, car sous son air calme et froid, la Finlande était un pays dangereux. Il n'avait pas connu de décès de connaissances personnelles quand il vivait en France. Il y en avait eu grand nombre en Finlande, l'une des plus tristes (dans son souvenir) étant la mort d'Arvi, bien que celui-ci ait eu la chance d'être tué sur le coup. Peut-être la plus triste parce que la plus bête et aléatoire: se trouver juste au mauvais endroit au mauvais instant (même pas "moment"). Bien sûr, la mort d'Atte l'avait personnellement plus affecté, mais Arvi n'avait aucune raison de mourir, lui, alors que les rechutes alcooliques chroniques d'Atte l'exposaient à de nombreux risques d'accident, bien qu'il s'abstînt de conduire dans cet état: "mon permis de boire", disait-il en montrant sa carte orange. Aymrald avait le pressentiment que le prochain serait Mika, sauf si, puisque déjà condamné par Huntington (comme lui), la Mort ne l'avait pas mis sur sa liste des priorités du moment. Si la Mort avait réellement voulu le destabiliser, elle lui aurait aussi pris Gorak, donc il n'y avait rien d'intentionnel ni d'irrationnel dans tout ceci: Juustomeijeri était juste un endroit où il avait beaucoup d'accidents et de suicides. La plupart des morts étant des gens qu'il ne connaissait pas, rien n'était centré sur lui, statistiquement, à part quand même le coup du camion. Oui, mais seule cette maison avait été construite au bout d'un tel virage. Cela expliquait aussi que BFR eût pu l'obtenir facilement: les gens du coin devaient se douter de ce qui arriverait un jour, eux. Cela expliquait qu'il y fût logé: rien n'était "bizarre", finalement.

. La piscine fraîche étant toujours en service, il put y reprendre son entraînement en monopalme, aux heures creuses. La chaude était en cours de réétanchéïfication. Il resterait une rupture de continuité visuelle dans le revêtement, surtout dans le bord gauche (quand on regardait vers les plongeoirs), mais ce serait lisse au toucher. L'usine BFRSF avait déjà connu quelques fractures du sol.

. Il commença l'apprentissage du ski alpin au simulateur: outre les fixations et les bâtons simulant tactilement tout ce qui allait se passer (dispositif déjà vu ailleurs) les lunettes de ski étaient à immersion stéréoscopique. Des ventilateurs soufflant de l'air froid de diverses directions complétaient l'impression de réalisme de cet entraînement. Seules les chutes n'étaient pas réalistes, car cela eût trop compliqué le mécanisme. Il aurait à jouer un moniteur de ski dans "Danger: nouilles" en fin d'hiver prochain, et il n'avait jamais pratiqué le ski antérieurement. Toutefois, ayant déjà constaté qu'il apprenait vite ce qui demandait adresse, équilibre et réflexes (y compris l'hélicoptère) il supposait qu'il en irait de même pour le ski. Si ce n'était pas le cas, Knut le doublerait pour ces séquences-là, d'autant plus facilement qu'en tenue de ski la substitution pouvait se passer de toute "bidouille" infographique, puisque VTP n'aurait besoin de Knut que pour skier et non pour être vu à l'arrêt ainsi.

. Chez BFRSF, il eût à contrôler la mise en oeuvre de nouvelles micro-algues commestibles à croissance électrostimulée sur des grilles servant de biocatalyseurs. Il était ainsi possible de produire de grandes quantités de ces végétaux marins riches en protéïnes dans un volume réduit, puisqu'ils n'étaient plus dépendant de l'illumination. L'électricité géothermique était si peu chère que cette méthode constituait un gain par rapport aux contraintes techniques d'une culture et récolte à la surface de la mer, dans des casiers transparents. L'autre intérêt était que cela pouvait être cultivé n'importe où à condition de disposer d'eau de mer et d'une source d'électricité. C'était le cas au fond des océans, le long de la dorsale atlantique avec la géothermie qui y était disponible sans creuser.

. De tout ce qu'il avait pu voir de Gamma depuis ce qu'il avait eu à y jouer, le scénario lui semblait tenir la route: un tel personnage eût été populaire, y compris dans l'armée (vu ses exploits), et n'aurait eu aucun mal à succèder à Hitler après l'avoir assassiné, le seul bémol étant qu'il n'aurait pas tardé à l'être à son tour, vu le nombre de perdants parmi les ex-puissants, à l'instauration du "second nazisme": la nouvelle "nuit des longs couteaux" n'aurait probablement pas réussi à trouver et éliminer tous les anciens hitlériens non ralliés à Thorgård, de plus certains auraient pu feindre de faire allégeance pour mieux préparer l'occasion de s'en débarasser.

. Il reprit aussi sa place dans l'équipe de rinnepallo de Juustomeijeri, où Mika était en rôdage dans l'équipe "bis". Il y avait un match contre la Suède (Uppsala), deux jours après son retour, match que pour la première fois Juustomeijeri perdit: ceux qui avaient été prêtés à VTP en septembre avaient un peu perdu leurs repères, estimaient l'entraîneur, bien qu'ayant pu s'entraîner avec l'équipe de VTP22, sur place, et ce jour-là Uupala avaient eu de la chance, avec quatre de ses essais en posant le dé avec le cinq ou le six en l'air, alors que juustomeijeri en avait aussi mis quatre, mais avec moins de points. Il était très rare d'avoir le temps de tourner le dé avant de le poser, donc il y avait une part de hasard dans la valeur des essais. Bien qu'Erwann eût mis à lui seul un essai, les quatre transformations, les six pénalités et cinq "drops" aux Suédois (qui n'avaient pas chômé non plus dans ce domaine, mais avec trois drops au lieu de cinq), il manquait huit points à Juustomeijeri à la fin du match. Les étudiants d'Uupsala fêterent l'évènement jusqu'à l'aube.

. Parmi les Karéens locaux (en fait il n'était pas de Juustomeijeri: VTPSF l'avait trouvé lors d'un casting à Tempere), Iivu Kivinen, 26 ans, 1m94, 100kg, n'était pas aussi musclé que Torbjörn mais "bien assez" selon VTP. Il avait déjà joué des rôles d'action pour VTPSF, dès l'époque de "Drakkars et dragons", il avait un bon sens de l'équilibre glissé puisqu'il était jusqu'alors "titulaire" de l'équipe 2 de Juustomeijeri et donc remplaçant dans l'équipe principale. Un air moins glacial que Torbjörn (mais très karéen néanmoins. En fait il évoquait plus Leo, et pas seulement parce que coiffé à peu près comme lui), excellente discipline alimentaire. Stéphane le connaissait un peu, tant par VTPSF que par le rinnepallo, mais bien que n'étant pas glacial comme Kare, Iivu était plus finlandais que Viljami ou Léo donc ne lui aurait pas adressé la parole sans nécessité. Stéphane non plus (en "bon élève" des usages finlandais) donc ils n'eurent pas l'occasion de converser et moins encore de bavarder. Stéphane pensa à cela lors d'un match d'entraînement où il le plaqua (effet de levier pieds au ciel: le "démonte-pneu") et où dans la chute qui s'ensuivit le Karéen lui retomba dessus dans une orientation autre que celle prévue (un pied d'Iivu avait probablement glissé, ou il avait tenté de pivoter pour se débarasser du démonte-pneu): Stéphane sur le dos et Iivu sur la tranche, transversalement au niveau du sternum. Le Breton avait juste eu le temps de faire le plein d'air et contracter les abdominaux pour mieux amortir le choc (réflexe acquis avec VTP) mais avait craint sur le moment d'avoir des côtes cassées. Le soigneur vint vérifier avec l'échographe portable. Ne pas bouger avant: on avait le temps, ce n'était qu'un entraînement. Il fit signe aux autres qu'il n'y avait rien de grave: en fait c'était seulement douloureux. Il n'existait pas de protections sous maillot, au rinnepallo. Il n'aurait pas dû prendre le risque d'effectuer la manoeuvre ainsi, même s'il était difficile de prévoir qu'Iivu tomberait dans le sens inverse de celui prévu. Ils examinèrent tous deux l'enregistrement télémétrique: dérobade vers l'avant du pied gauche d'Iivu, par baisse momentanée d'adhérence (ce qui ne se serait pas produit au rugby) car la prise de Stéphane avait à cet instant augmenté de poids de l'ensemble sur le pied droit du Karéen, au détriment du gauche. Le cas fut étudié par l'équipe de façon à limiter ce genre de risque: d'abord au simulateur, puis avec un robot préprogrammé à la place de Stéphane, ce dernier n'étant pas destiné à servir N fois de tatami pour joueur de 100kg, ce qui avec la vitesse de chute représentait la pression momentanée d'une voiture moyenne qui lui aurait roulé dessus. Pour impressionnant que ce fût, passer sous les roues d'une voiture (si elle n'y restait pas) faisait généralement bien moins de dégâts (et parfois aucun: ça dépendait d'où la pression avait lieu) que d'être percuté directement. Pour le rinnepallo, Iivu était un des joueurs lourds, mais Stéphane songea que dans un match de rugby il aurait pu recevoir un pilier de 130kg: VTP avait raison de le lui interdire, car des côtes felées auraient pu l'empêcher de participer à un tournage, ses rôles demandant toujours de l'action, de la souplesse et une réactivité nécessitant d'être en pleine possession de ses moyens. VTP avait d'ailleurs prévu qu'en cas d'accident on ne l'utiliserait pas pour autant dans des rôles passifs: soit il ne jouerait pas (on prendrait un autre acteur), soit le rôle utiliserait plus de robotique, plus d'infographie et parfois une doublure transformée infographiquement en lui dans les scènes où ce serait possible.

. Tournage pour VTPSF, portant son compteur de films (entièrement tournés) à 44: "Silmät" (les yeux), rôle conçu à l'origine pour Atte et légèrement remanié cet été pour y utiliser Erwann: action plus difficile (en tirant partie de ce qu'il avait appris de plus dans le stage commando, bien que ce ne fût pas un film militaire) et temps de présence à l'écran un peu réduit dans les scènes moins actives. Des composants optionnels du scénario avaient été ôtés ou rajoutés, en faisant beaucoup d'essais comparatifs (en version "virtuelle économique") cet été. Il y jouait à la fois un des enquêteurs de la police (Aleksi Koskenranta) scientifique finlandaise et le tueur (Kim Mikkonen), qui étaient effectivement le même personnage dans le film et pas uniquement joué par le même acteur mais avec lentilles bleues (en fait: infographie, mais le personnage était censé en porter) les cheveux rangés autrement ("géométrie 2", comme pour Serrannix) et souvent des lunettes de soleil (c'était en plein été finlandais), pour l'enquêteur. L'utilisation du même acteur dans plusieurs rôles (mais plus rarement dans les films "froidement sérieux") chez VTP/VTPSF n'étant pas une première, rien n'assurait que ce fût un seul personnage (on pouvait aussi penser à un frère, éventuellement, pour soupçonner quelque chose). Des lentilles pour mieux cacher un oeil de verre contenant à la fois un appareil photo numérique (il était techniquement facile d'y loger un capteur CCD, sans recourir à la SF) et un laser à ultraviolets pouvant (sans éblouïr: là était le secret) brûler la rétine de l'oeil (l'un puis l'autre) qu'il regardait. Ca aussi, c'était su plus tard dans le scénario (mais bien avant la fin).
. Le tueur (on voyait la scène sans pouvoir identifier clairement qui c'était, car il portait une cagoule) avait été éborgné et diversement esquinté, vers le début du film, par le chien d'une réparatrice de lampes Tiffany (d'où le gros fer à soudé, branché) chez laquelle il tentait un cambriolage, au 22ème étage d'une tour en escaladant la façade. On voyait le chien s'acharner dessus, pendant qu'une main attrappait un fil électrique, faisait tomber de l'établi le fer à souder en tirant dessus puis le plantait jusqu'au manche dans l'anus du molosse. Celui-ci lâchait sa proie en hurlant à s'en déchrocher la mâchoire et se contorsionnant en tous sens pour essayer d'expluser l'objet, puis était électrocuté mordant dans le gros fil électrique: pas d'étincelles ni d'auréole bleue (ce n'était pas un téléfilm américain) mais un dernier saut de carpe dorsal, retombant raide et immobile calé contre le mur, les pattes en l'air.
. Ca allait très vite pour ne pas verser dans le comique. Bien plus tard dans l'enquête (après une première série de meutres ayant laissé les victimes sans yeux et le coeur extrait, ainsi que d'autres organes manquants) le chien était exhumé pour chercher de l'ADN éventuellement encore présent sur ses dents. On en trouvait provenant de chair humaine, dont un oeil.
. Il y avait quelques "flash-back" dans cette histoire (VTP y recourrait rarement, mais quand ça vallait mieux qu'un autre moyen d'expliquer quelque chose, ce n'était pas formellement interdit aux scénaristes, en particulier ceux de VTPSF) mais toujours brefs, et souvent un peu accélérés.
. On n'avait pas vu qui s'était fait déchiquetter par le molosse, ni le résultat (la cagoule était maculée de sang, une manche aussi) donc c'était plus tard que l'on assistait en accéléré à la reconstruction de Kim (le tueur) par ce que l'on pouvait supposer être un chirurgien opérant hors hôpital. En praticulier, l'insertion d'une prothèse occulaire (gauche) spéciale puisque mobile (comme l'autre oeil) et prolongée par des fils qu'un système d'aiguille "furet" permettait ensuite de faire passer sous la peau. La chirurgie esthétique plus classique (il y avait bien d'autres dégâts à reprendre) était résumée et accélérée: les gens avaient déjà vu ça dans des séries télévisées, estimait VTPSF. Avant cela, il y avait eu le vol dans un musée d'une arbalète à tour (à manivelle) du XIème siècle, qui expliquait effectivement certaines blessures retrouvées sur des victimes. La K7 de vidéosurveillance n'était retrouvée que plus tard. On voyait Kim (peu reconnaissable car sommairement pansé, et coiffé bien plus long: en fait déjà joué par Viljami, avant le retour d'Erwann en Finlande, car vu la définition vidéo, l'angle de prise de vue l'état dans lequel le personnage était difficile de savoir de quel Attéen il s'agissait, pour le spectateur) s'emparer de l'arme, d'un carreau dans la même vitrine, la remonter et se caler dans un angle de mur pour se transpercer le crâne avec, le bout de l'arbrier en plein milieu du front, quand une main imprévue interrompait ce projet. Quelque chose était dit que la vidéo n'enregistrait pas (trop loin du micro) puis l'homme au manteau à capuche, "Kim 1" et l'arbalète quittaient le musée. Viljami jouait un autre rôle annexe (coiffé de l'accessoire Arvi, cette fois), dans ce film: un installateur d'antenne parabolique motorisée typique du Lioubioutchaï 3 que Kim (Kim 2) faisait tomber du toit (pas forcément exprès: difficile à dire. L'installateur se fracassait le dos en tombant à la renverse sur l'angle d'un balcon en verre massif, quatre étages plus bas. Image brève, mais "lisible"...) en le bousculant lors d'une poursuite par un policier, qui, lui, tombait et s'écrasait dans une autre rue (disloqué sur une moto en stationnement: visuellement, ça faisait plus mal à voir que sur le trottoir ou la chaussée) un peu plus tard, en ayant tenté de sauter par dessus un bloc de maçonnerie portant des sorties de cheminées juste à la suite de Kim, sans savoir que celui-ci s'y était retenu d'une main: on voyait le jeune policier finlandais tomber tout en l'apercevant accroché ainsi au dernier moment, avec une expression de surprise puis de terreur au cours de sa chute. Il n'y avait rien, derrière les cheminées, à part la rue huit étages plus bas. Il y avait beaucoup de "dommages collatéraux", dans ce film, certains dûs à Kim (c'est à dire en plus de ses cibles prévues), d'autres à la police, ce qui contribuait au manque de témoins pendant une bonne partie du film. A cette époque, l'arbalète qu'il utilisait n'était plus la grosse du musée, mais un petit modèle pliant en fibre de carbone, dont les demi-arcs étaient disposés en V vers l'avant, donc hors de la ligne de tir (modèle en patte d'oie). En repliant ces demi-arcs (rectilignes, hors charge) contre l'arbrier (il suffisait de déplacer deux cales) le tout n'était pas plus encombrant qu'un parapluie pliant.

. Dans le résumé final des rôles, Viljami était remontré brièvement sur le point de se suicider à l'arbalète dans le musée (vidéo noir et blanc à lignes visibles), puis (filmé bien net) perdant l'équilibre sur le toit au passage de Kim. Dans l'esprit du public finlandais, Viljami ne remplacerait jamais Atte tout en y restant comparé que VTPSF le voulut ou non, là était son handicap principal, mais VTPSF estimait que l'on finirait par l'apprécier pour ce qu'il était. Quant à Mika, il était jugé apte à certaines scènes d'action (le rinnepallo étant un bon entraînement à l'équilibre et aux changements rapides de trajectoires) et VTPSF le mettait dans plus de rôles depuis Serrannix. Depuis "Torx", VTPSF avait obtenu une bonne part d'initiative dans les scénarii et dans la réalisation, tout en ayant besoin du feu vert de VTP pour accéder aux gros moyens infographiques, pour les emprunts de certains acteurs et de la robotique supplémentaire. "Drakkars et Dragons" était un projet 100% VTP tourné en finnois en Finlande par VTPSF selon les directives des réalisateurs français. Torx était entièrement finlandais. Silmät l'était à 76%: 24% du scénario et du pré-montage des scènes avait été redéfinis par VTP.

. La réalisation préférait l'image (parfois sans le son) à des mentions explicites, d'où la vidéo du musée (pas besoin d'une bonne qualité d'image) et le flash-back (de bonne qualité visuelle) de la chirurgie reconstructrice. Kim tuait pour assouvir une sorte de vengeance indirecte (pouvait-on supposer: ce n'était pas mentionné) mais en même temps (et ça, on ne le découvrait que près de la fin) pour alimenter le trafic d'organes organisé par son chirurgien sauveur. Le scénario existait depuis 1999 et avait été remanié maintes fois, tant par VTP (qui voulait retrouver quelque chose de "peur sur la ville", avec l'histoire de l'oeil. Effectivement, à un moment, Aleksi ne voyait pas quelque chose avant d'avoir tourné la tête, ce dont un de ses collègues ne se souvenait que plus tard) que par VTPSF qui voulait quelque chose d'encore plus froidement méchant que ça n'en avait l'air (d'où l'idée du trafic d'organes déguisé en assassinats rituels d'un maniaque). Beaucoup de scènes de nuit (ça, hélàs, ça passerait mal en télévision dans les zones de mauvaise réception, savait VTP) avec des escalades d'immeubles, ou l'infiltration par autres astuces, et aussi des souricières tendues par la police scientifique qui soit échouaient, soient prenait quelqu'un d'autre. Et pour cause: le tueur avait un oeil (un seul, effectivement) dans leur équipe. Les scénaristes avaient eu le temps de le reconcevoir en grande partie, pour éviter trop de parallèle avec "Viande urbaine": initialement, Kim mangeait les organes prélevés. Dans la version tournée en octobre 2001, il cuisinait et dégustait encore les coeurs (on ne le voyait presque pas le faire, mais on pouvait le deviner, car on ne les retrouvait jamais), mais uniquement eux, et uniquement quand ils ne correspondaient pas (groupe HLA) à une commande.

. Erwann n'était que le cinquième acteur en temps de présence à l'image (et s'il n'y avait eu le personnage infiltré Aleksi, il n'eût été que onzième), mais en même temps la pièce centrale du puzzle y compris quand on ne le voyait pas. Ce n'était pas du "Kerfilm" car il n'y avait pas une prépondérance d'action au sens strict: c'était un thriller d'angoisse qui passait assez vite sur les scènes les plus "beurk" parce que justement ça leur donnait plus d'impact: pas le temps de chercher à voir comment ça avait pu être truqué, tout en étant très long à raconter (il s'y passait énormément de choses, mais autour du même thème). Bien sûr, VTPSF s'était inspiré (à petites pincées, sans être identifiables, à quelques exceptions près) de nombreux tournages de "films noirs" criminels. Les autres personnages (y compris policiers) n'étaient pas si simples que ça non plus: des négligeances, de la corruption (pas par le chirurgien trafiquant, qui n'était pas en contact avec eux, mais par des entreprises travaillant pour la municipalité, d'où du travail clandestin au détriment des priorités de l'enquête et conduisant même à égarer des pièces à conviction: volées dans une voiture de service qui n'aurait pas dû se trouver là) et un peu trop d'intérêt du psychiâtre travaillant avec l'équipe pour l'histoire des yeux, après avoir retrouvé dans un sous-sol d'un immeuble en construction (chantier laissé en jachère pour cause de crise économique) une cache aménagée probablement par le tueur, avec des tubes en verre qui contenaient des yeux en suspension dans un liquide conservateur, animés de mouvements de ludion par un mécanisme de compression. Cette découverte était moins un coup de chance qu'elle n'en avait l'air, comme on le comprendrait bien plus tard: Kangasniemi, le chirurgien traficant, avait besoin de mettre la police sur l'hypothèse du psychopathe fétichiste (tout en ayant placé des empreintes digitales, de l'ADN, etc, correspondant à quelqu'un d'autre, dans cet endroit) pour mieux les égarer. Le constat fait en comptant les tubes et les yeux: "alors c'est que nous n'avons trouvé que les corps dont il n'avait pas pu se débarasser".

. La scène où la police (y compris Aleksi) pénétrait dans le repère était conçue en pensant que le spectateur ne comprendrait pas tout de suite ce qu'il y avait dans les tubes évoquant certaines lampes décoratives (ça allait jusqu'au plafond). Les "surprises" étaient chaque fois différentes. Au fil de sa mise au point le scénario avait été maintes fois critiqué (le film existait en "virtuel économique", ce qui avait aussi permis de tester des choix d'acteurs, eux aussi simplifiés) puis retouché. VTPSF estimait que c'était au point (on ne pouvait rien ajouter sans faire "voulu", ni rien retirer sans perdre de l'impact ou de la tension scénaristique), qu'Erwann serait très bien là-dedans (d'où les scènes d'escalades, sauts, etc, peu truquées): le tournage avait pu être programmé en parallèle de "Mort radieuse" qui était plus classiquement (quoique fort noir lui aussi) du film d'action à la VTP. "Silmät" ne devait surtout pas ressembler à un épisode de série policière. Il durait 2h28, et ne supposait pas de personnages "récurent" donc des membres de l'équipe y passaient aussi, rétine brûlée aux ultraviolets, ou éborgnés par des fléchettes empoisonnés, ou parfois tués à l'arbalète au carreau explosif: la pointe était un mélange de phosphore blanc et de sodium, finement verni. Préparé par Kangasniemi, tiré par Kim, mais parfois aussi directement par Kangasmiemi (quand c'était facile) ou par automatisme autoguidé (Aleksi avait placé une petite étiquette à radiofréquence dans la doublure de la veste d'un de ses collèges, puis l'avait escamotée lors de l'étude scientifique des traces sur les vêtements, profitant de la combustion dans cette zone) pour éviter l'absence d'Aleksi lors de cette attaque, donc ne pas suggérer cette corrélation.
. Le trafic d'organes n'était soupçonné que vers la fin, suite à la perte d'une boite isotherme par Kim, dans une poursuite et fusillade sur les toits, boite retenue par une gouttière d'un autre toit (en contrebas) qui s'avérait contenir une paire de reins soigneusement extraits par découpe et non arrachés: le corps n'avait été labouré à cet endroit avec un instrument (ou un gant?) à cinq griffes en acier que pour faire croire à un crime "sauvage". Après extraction propre, devinait alors le médecin légiste. Le public attentif pouvait arriver à corréler plus tôt Aleksi et Kim (car on ne les voyait jamais au cours d'une même scène, bien que deux des attaques en cours d'explorations de locaux inconnus [sans voir Kim, mais avec la même arme] pussent suggérer le contraire, Aleksi étant parmi les enquêteurs) mais ce n'était pas la vraie "clef" du film.

. N'étant pas un des acteurs les plus utilisés à l'image (mais bien plus présent par ses actes, via l'enquête) il n'avait eu sur le moment qu'une connaissance partielle du scénario: celle dont il avait besoin pour ses scènes. Il n'avait en particulier pas connaissance de celle (jouée par Viljami) avec l'arbalète dans le musée, ni de la reconstruction chirugicale (mannequin charcutable, d'autant plus facilement qu'endormi pour l'opération) ni de certains cadavres retrouvés. Par contre, il connaissait celle du chien, pour avoir contribué aux règlages de celui-ci, qui reprenait la logique et la machinerie (améliorée entretemps) de ceux de "Cave canem". L'agresseur cagoulé était par moment lui (ce qui facilitait la synchronisation du chien, car à son contact direct il pouvait déclencher précisément son scénario de morsures et contorsions), par moment un robot, selon les besoins. Ceux qui avaient vu "Cave canem" s'attendraient peut-être à ce qu'il plantât quelque chose dans les yeux du chien, sa truffe, ou (vu dans Cave Canem aussi) lui empoignât et brisât le pénis à deux mains: les chiens y avaient un os. Le gros fer à souder dans l'anus était inédit mais logique, car tel que le chien lui mordait le visage, il n'aurait pas pu (surtout du sang plein la cagoule) tenter de viser les yeux ou la truffe sans risquer de se brûler lui-même. Une main gantée empoignait le sexe et les testicules, pour avoir un repère tactile, l'autre plantait l'outil sous la queue. C'était très rapide, donc la plupart des spectateurs n'auraient pas en détail le deux gestes précédents, mais juste leur résultat: le grésillement, la fumée bleuâtre ("barbecue") et le fil sortant sous la queue tandis que le chien hurlait gueule ouverte (donc avait lâché sa proie, qui n'attendait pas la suite pour s'enfuir). On avait vu la restauratrice de lampes Tiffany manier ce fer au début de la scène de l'intrusion, pour que ce ne fût pas "sorti du chapeau".

. Aymrald chercha sur le Lioubioutchaï si comme l'avait prédit Flavia des images de lui dans le match contre la Suède (perdu, hélas) avaient fait leur apparition dans des forums. Oui. Il retrouva aussi l'image dans un site répertoriant tous ses personnages (images de films) et les corrélant avec des images "du réel" (quand le site en avait. Avant le rinnepallo, c'était rare): date de lancement du film, date de tournage probable. Il apprit (en suivant un lien vers une actualité récente vers cet autre acteur de VTP) que Torbjörn n'avait pas renouvellé de contrats avec VTP après "Gamma": il jouerait dans les films déjà signés (dont Yaganda), toutefois, et une photo (extraite du journal "L'Equipe") le montrait qui effectuait un plaquage spectaculaire dans les entraînements de l'équipe de Dinan. Avec Torbjörn, l'élégance s'ajoutait à la puissance, très "dieu du stade" au sens du film de Leni Rieffenstahl, puisque c'était juste après le tournage de Gamma. Cette fois il était en vrai dans les vrai matchs.
. Torbjörn jouerait "3/4", le plus souvent comme 11, symétrique de Lefar (14). Le Finlandais Riku Väänänen, 2m08, était maintenant souvent utilisé comme remplaçant en 2ème ligne. Quand Torbjörn jouait aussi, cela faisait six grands blonds (avec la première ligne Krüger) à bord de l'équipe, mais en dehors des jumeaux Krüger on ne les confondait pas.

. Au Dynamo de Dinan, Torbjörn avait convaincu par sa vitesse (même si Lefar restait un peu plus rapide en ligne droite), son agilité et son sang-froid suédois lui donnant une "intelligence immédiate" dans les feintes ou passes à décider dans le dernier dixième de seconde. Il avait aussi pris de nombreux coups, mais sans conséquences fonctionnelles ni visibles: ses réflexes de cascadeur s'avéraient fort utiles aussi au rugby. On soupçonna un peu plus Dinan de chercher à plaire au public en enrôlant ce somptueux Suédois (le public ignorait qu'il s'y entraînait déjà intensivement), mais ses accélérations, son endurance, sa vue perçante et ses bonds de félin au moment des plaquages justifiaient entièrement sa présence à bord. Après tout "Angel" aussi avait été d'abord connu du public dans des séries télévisées et même quelques rôles dans des films de VTP, avant que le Dynamo de Dinan ne commençât à intéresser les médias, et le club n'avait pas été critiqué pour ce "recyclage". Toutefois, on constata une augmentation du public féminin dans le stade quand la nouvelle de son intégration progressive à l'équipe fût connue. Il y avait déjà du télégénique à bord, mais visiblement, une partie du fan-club cinématographique du Suédois commençait à s'intéresser au rugby. Chez VTP on prenait ça avec fatalisme, puisqu'il existait des remplaçants valables pour les tournages futurs. Lucien Venant avait dit: "il faut les comprendre: elles viennent toutes le voir pendant qu'il est encore en bon état". Dinan n'était donc pas uniquement du rugby scientifique (voire "industriel"): ça pouvait aussi être du rugby médiatique, même si les matchs n'étaient ni précédés ni suivis de spectacles. Riku Väänänen n'était pas acteur, à l'origine: il jouait au rinnepallo, en plus d'être un excellent nageur grâce à son envergure. Ce "deuxième ligne" de 2m08 et 112kg avait été surtout choisi comme sauteur lors des lancers en touche, mais il s'avérait d'une efficacité suffisante dans les "déblayages" et aussi pour contribuer à pousser la première ligne en mêlée. BFR avait tout de même une petite crainte: cette grande taille augmentait les contraintes subies par les articulations en cas de pression transversale. Le club ne l'utilisait pas encore sur tout un match: il rentrait comme remplaçant pour faire gagner de la hauteur à la deuxième ligne déjà bien dotée dans ce domaine: Etienne Tronscorff, 22 ans, 2m01, 109kg, et Damien Le Golvan, 1m97, 112kg. Quand Riku était mis en jeu, Dinan disposait de quatre joueurs de plus de 2m, avec les jumeaux Krüger (2m04 et 2m05), bâtis plus massifs que les "2ème ligne".

. Torbjörn apprit à jouer des deux côtés, de façon à pouvoir remplacer tantôt Kerzadenn (11), le virtuose du cadrage-débordement "dans une cabine téléphonique", tantôt Lefar (14), le "TGV Atlantique", joueur plus rapide et plus percutant (dans son style de jeu) que Kerzadenn en échange de ne pas avoir une maniabilité aussi surprenante. En fait, Torbjörn s'avérait avoir des performances de course et évitement (gestion des appuis) intermédiaires entre ces ceux-là, tout en étant remarquable comme sauteur-plaqueur donc comme intercepteur à la fois des joueurs rapides et des joueurs les plus lourds. Parce que c'était ce qui évoquait le plus son entraînement d'acteur-cascadeur, aussi parce que ça l'amusait, et que comme tout Suédois il restait sérieux et efficace même en s'amusant. Miser maintenant (même si la mise en jeu "à plein match" de Torbjörn attendrait encore un peu, en raison des films que VTP avait encore à tourner avec lui donc en bon état) sur trois ailiers à hautes performances donnerait plus de souplesse à la composition des équipes pour Dinan, de même que le troisième "2L", le Finlandais, éviterait à Dinan de jouer presque toujours avec les deux mêmes. Torbjörn avait aussi beaucoup travaillé les tirs aux pieds: certes, on ne lui confierait probablement pas les pénalités et transformations, le 10 étant déjà expert dans ce domaine, mais il était intéressant pour l'équipe qu'un ailier rapide et agile fût apte à improviser un drop en fin de course, s'il ne disposait pas d'une autre solution de jeu à cet instant en terrain adverse. Ce fut donc surtout les drops qu'il eut à travailler. En fait tout le monde travaillait les drops, à Dinan, doué ou pas. Sans être un excellent buteur, un joueur bien entraîné aux drops serait à même d'en réussir quand il se trouverait suffisamment près des poteaux adverses, ce qui multiplierait les occasions de marquer des points, en particulier suite à une passe faite depuis un "maul" ayant été bloqué par l'adversaire un peu avant l'embut. Il n'était pas nécessaire que tous les joueurs fussent entraînés au lancer en touche (il suffisait d'en avoir deux ou trois, d'autant que ces lancers étaient surtout un défi pour les sauteurs, bien moins que pour le lanceur, qui devait juste veiller à faire le type de parabole prévue de façon à ce que le temps de vol restât celui que les sauteurs connaissaient pour le lancer convenu entre eux et le lanceur pour cette touche) ni aux tirs de pénalités, car dans ces cas, l'équipe pouvait choisir son meilleur joueur pour la situation, alors qu'un drop devait pouvoir être improvisé (si l'occasion s'en présentait) par le joueur ayant le ballon dans une position favorable, quelque fût ce joueur. Les joueurs pouvaient s'y entraîner seuls, même hors du terrain principal (donc plusieurs pouvaient s'y entraîner en même temps): les robots figuraient les obstacles mobiles (autres joueurs) à l'instant du tir, que le "dropeur" n'avait qu'une fraction de seconde pour à la fois décider de tenter ou non et tirer s'il le décidait. C'était la partie du rugby qui gardait une parenté avec le football (sauf qu'il fallait faire passer le ballon au dessus de la transversale, et non dessous), les deux jeux ayant une origine commune au XIXème siècle en Angleterre. L'entraînement était d'ailleurs proche, sur ce point, de celui des footballeurs, et certains clubs avaient utilisés d'anciens footballeurs comme formateurs pour les tirs aux pieds de certains de leurs joueurs. Les lunettes à réalité virtuelles étaient utilisables dans ce type d'entraînement, puisqu'il ne comportait pas le contact directs entre joueurs, et que cela permettait de placer les poteaux (virtuels) et bien plus d'autres joueurs dans le champ de vision que les vrais robots jouant ce rôle uniquement pour les plus proches du tireur.
. Dinan ayant étudié tout ce qui était "rare mais lucratif" (au score) au rugby entraînait aussi des binômes dans lequel un joueur (tout en évitant d'être hors-jeu) devait se jeter pour applatir le ballon qu'un autre (souvent très décalé lateralement) allait envoyer au pied devant l'embut, voire légèrement dedans. Du déjà vu, mais systématisé dans l'entraînement de Dinan. La puissance de la mêlée de Dinan, et son rôdage en agilité (pousser d'un côté puis soudain de l'autre, etc) depuis longtemps laissait du temps aux joueurs pour travailler les autres points techniques du jeu, en particulier au pied, ce que l'analyse infographique permettait d'optimiser (pour chacun, selon son type de détente musculaire et ses reflexes existants) plus vite que les méthodes classiques. Eviter les fautes, éviter la casse (les fautes adverses étaient une occasion de prendre des points au pied, voire des essais si ça offrait l'occasion d'une mêlée proche de l'embut, mais il fallait savoir éviter ou parer efficacement celles pouvant endommager des joueurs), optimiser le jeu au pied, synchroniser des relayeurs pour permettre des passes "en aveugle" (sans se retourner, pour en avertir le moins possible les adversaires), tout ceci se travaillait et se réexaminait facilement dans le système entièrement instrumenté dérivé de celui du rinnepallo. Dinan n'était pas encore très connu, donc ses succès "qui montent" étaient souvent mis sur le compte de sa première ligne impressionnante ("le mur de l'Atlantique"), sur la précision de tir de Valentin Yvinec (le 10) et de quelques autres et sur la vitesse de Lefar, mais en fait la mécanique mise en oeuvre était bien plus sophistiqué que ces "quelques joueurs remarquables". Il y avait les "avions furtifs", sans lesquels les précédents auraient eu bien moins l'occasion de s'exprimer. En particulier le 9 (Le Clézio), qui était l'un des "bus de données" (de ballons) de l'équipe un peu partout, tout en participant rarement aux contacts. Le 15 comptait aussi bien plus qu'il n'en avait l'air, l'équipe avait un rendement remarquable en touches (aptitude à capter plus souvent que la moyenne des équipes celles de l'adversaire, surtout maintenant avec le "Finlandais volant" Väänänen), ce qui compensait le jeu un peu trop "propre" dans les phases d'impact (soucis de ne pas offrir de fautes à tirer à l'adversaire) et les mêlées ouvertes. Il y avait des amateurs de rugby que cela décevait un peu, d'où le terme "rugby industriel" et parfois "zéro défaut, zéro essai", quand Dinan ne s'était nourri que des tirs aux pieds offerts par les fautes de l'adversaire. La "Panzerdivision" Krüger était redoutée par son gabarit mais manquait un peu de maniabilité (on ne pouvait pas tout avoir) même si celle des jumeaux Krüger ("Musclor", "Kerminator", etc: ils avaient quantités de surnoms) vallait bien celle de piliers 10kg moins lourds. Rare étaient ceux qui tentaient encore des "fourchettes" contre Fritz Krüger, la tortue happeuse qui en était maintenant à 31 doigts adverses happés et pliés à contresens. Parmi les fiches sur lui:

§§Fritz Krüger est un rubgyman allemand (talonneur) du Dynamo de Dinan né à Munich le 25 avril 1979.
Il semble grand pour ce poste (1m94, 124kg) mais est porté en mêlée par ses deux cousins piliers bien plus impressionnants. Ce joueur lourd et puissant, adroit de ses jambes comme le requiert ce poste, s'avère aussi rapide que percutant quand il le faut et est ainsi le second pourvoyeur d'essais de son club après Pierric Lefar. Contrairement à ce qui se fait souvent ailleurs, Dinan ne lui confie pas les lancers en touches, préférant l'avoir comme élément d'impact dans l'alignement ce qui contribue à pouvoir improviser de temps à autres des touches courtes même si les grands "2ème ligne" de ce club suggèrent des lancers plus classiques. Il a aussi la réputation silencieuse de croquer les doigts adverses qui tentent vers lui une fourchette dans les mêlées. Le gabarit impressionnant des trois Krüger et la solidarité familiale que l'on tend à leur supposer sont à soi seul un élément dissuasif qui peut expliquer que cette première ligne prenne moins de coups vicieux que la moyenne de celles des autres clubs.
Mécanicien de formation, Fritz Krüger participe beaucoup à l'installation des systèmes d'entraînement mécanisés de l'équipe.
Si des trois Krüger de Dinan seul Görg a eu des rôles importants (Kerminator, les 12 travaux d'Hercule), Fritz a déjà joué dans des téléfilms d'action et même eu quelques petits rôles (généralement de méchant) dans des superproductions "Kerfilm".§§

. Dinan ne disposait que d'un seul pilier de rechange de niveau voisin: Kévin Mazurier (1m96 118g), qui pouvait aussi jouer ailleurs dans le pack. Les objectifs avaient été d'avoir un pack "mastoc" mais en même temps très maniable, d'où un entraînement robotisé, et des "tireurs d'élites" pouvant (outre réussir les transformations et pénalités) constituer un risque de drop dont l'adversaire devrait tenir compte (en plus d'avoir rôdé tout le monde aux drops, "au cas où"), l'obligeant à surveiller plus ces joueurs, et donc pas autant ceux risquant de faire plus classiquement une percée... Mais il leur fallait aussi mettre l'effectif pour arrêter les Krüger, surtout quand ils formaient un "maul" à trois de 381kg...

. Le stade de rugby de Dinan, créé par BFR en 1990, avait commencé par une équipe féminine (le F15, pas si féminine que ça à voir, disaient les mauvaises langues: les "déménageuses bretonnes" étaient efficaces dans ce championnat-là, mais on ne les eut pas choisies pour poser dans le calendrier Pirelli, même si quelques-unes s'avéraient photogéniques) en estimant qu'il était plus facile de réussir sur ce créneau moins exploité et d'y introduire des méthodes de préparation plus scientifiques que celles des équipes masculines habituelles. De cette origine mixte (utilisé tour à tour par les filles et les garçons. Pour le moment elles étaient bien mieux classées dans leur championnat qu'eux dans le leur) le stade avait une organisation interne rappelant une résidence universitaire: les vestaires étaient de petites "cellules" comportant aussi la cabine de douche (les toilettes, elles, étaient séparées, et non liées à telle ou telle cellule), ainsi qu'un miroir et une tablette fort appréciée de ces demoiselles (pas si "homasses" que certains le disaient) pour se remaquiller un peu après la douche, avant de rentrer chez elle ou dans la résidence attenante: il y avait des studios à prix modique. Les membres des deux équipes s'engageait à accepter toutes les analyses d'urine, de salive et trimestriellement d'un cheveu pour détecter toute trace de susbtance illicite (mais pas uniquement le tabagisme aussi était détecté très facilement dans l'urine) car BFR, multinationale alimentaire, ne pouvait pas se permettre une image malsaine. L'usine individualisait pour chaque joueuse ou joueur des compléments alimentaires (légaux) optimisés grâce aux analyses (qui n'étaient pas que du contrôle anti-dopage, mais aussi du contrôle de réaction métabolique, pour optimiser individuellement l'alimentation), leur faisait étudier des reconstitutions de matchs d'autres équipes (surtout les "All Blacks", mais pas uniquement). Pas de "troisième mi-temps" arrosée, pas de chahut dans les vestiaires puisqu'ils étaient individuels, études des tactiques de terrain un peu comme le faisaient les grandes équipes de football américain: le "rugby industriel" (on disait parfois "suédois", à l'époque, tellement tout y était sérieux, et même froid) du F15 et du Dynamo de Dinan portait ses fruits: faute de pouvoir s'acheter directement des joueurs de valeur, le club réussissait à en fabriquer, le problème étant le pillage de certains bons éléments par des clubs payant mieux. Le F15 réussissait fort bien (et le problème du pillage ne se posait pas, de ce fait), restait à ce que le Dynamo monte enfin en première division (il n'y avait pas encore le "Top 14" à l'époque). Il avait failli y parvenir à l'issue de la saison 2000-2001 et l'amélioration cet éte des techniques d'entraînement scientifiques rendaient l'objectif réaliste cette année.
. Torbjörn était donc peu dépaysé au Dynamo de Dinan: les contrôles sanitaires, la discipline, l'abondance d'équipements techniques dernier cri rappelaient VTP22. On leur enseignait à éviter (autant que possible, et surtout sans en avoir l'air vus des adversaires) les situations à risque articulaire "inutilement élevé par rapport à l'enjeu de l'instant". Le F15 avait un taux de blessure très faible. Le Dynamo aussi, et le but était de le conserver tout en faisant monter l'équipe "dans la cour des grands". Ceci avait certainement facilité le transfert de Torbjörn, qui gardait des contacts positifs avec VTP (il n'était pas considéré comme ayant trahi, mais ayant changé de fonction): VTP pouvait se procurer d'autres Karéens (VTPSF était fait pour ça) alors que c'était plus difficile pour le Dynamo.

. La pratique de ce sport (même amateur) était interdite aux acteurs de "premier rang" de VTP, de même que les perstations publicitaires hors BFR (ils n'avaient aucune obligation d'accepter celles de BFR, qui d'ailleurs ne les utiliserait que rarement, pour ne pas "gaspiller" leur image, mais ne pouvaient pas vendre ou louer leur image ailleurs) ou le mannequinat (sauf autorisation accordée pour certaines "causes", comme les vêtements recyclés ou la promotion de la fourrure de synthèse (Flavia en avait fait), etc). Il y avait la "réserve d'image", mais aussi la crainte pour VTP que des rémunérations externes (souvent excessives, du point de vue de VTP et du "citoyen lambda") fussent des incitations pour les acteurs à faire la fine bouche envers certains tournages (même dans des bons films, si le rôle leur semblait "pas terrible").

. Torbjörn Hultgren se sentait à l'étroit dans toutes ces restrictions: initialement, il n'était pas venu en France pour y faire voeu de discrétion (hors tournages) et de modération financière, même si au début ce que lui proposait VTP lui semblait bien suffisant. Il avait pensé démissionner cet été, mais il avait cru comprendre que Gamma serait refait sans réutiliser ce qu'avait déjà tourné Atte et que ce serait lui qui aurait le rôle principal: "Erwann a déjà assez de films sur la planche", etc. Ca n'avait visiblement pas été un obstacle, de plus Erwann avait empilé d'autres rôles, ne lui restituant comme premier rôle que celui du "second" du sous-marin (devenant capitaine) dans "Yaganda" en prenant celui du chasseur. Il jouait déjà clandestinement au rugby car les entraînements au simulateur dans la "base" VTP22 étaient tout à fait possibles.

. L'entrainement tactique était important, s'inspirant un peu (mais appliqué au rugby) en cela des équipes de football américain: il ne fallait pas que bien jouer, il fallait pouvoir surprendre l'adversaire, donc l'avoir longuement étudié, avoir recomposé ses matchs par ordinateur et quand c'était possible, en déduire un modèle de réaction de chacun des joueurs "clefs", comme la tendance à continuer de forcer le passage et ne tenter de passer le ballon qu'une fois bloqué, ou passer avant, et généralement de quelle façon. D'autres clubs le faisaient aussi, mais Dinan appliqua les heuristiques comportementales et les systèmes experts de VTP/BFR dans ce domaine, en espérant que les adversaires ne disposaient pas de procédés d'analyses de mouvements et de décisions de jeu aussi sophistiqués. Ce qui avait si bien réussi au rinnepallo devrait pouvoir marcher au rugby, même si (contrairement au rinnepallo) on ne pouvait pas se contenter de quelques virtuoses du slalom sur herbe avec une excellente tactique pour gagner: il fallait aussi de gros engins de chantier comme les Krüger. L'entraînement optimisé informatiquement devait donner un peu plus d'agilité et de réactivité aux poids lourds et améliorer les feintes des rapides pour éviter de se faire percuter par un rhinocéros adverse. La première ligne allemande était à la fois puissante, agile (pour sa masse de muscles) et remarquablement disciplinée, permettant à Dinan de subir bien moins de tirs de pénalités sur fautes, tandis que son excellente "artillerie" (10, 8, 5) ne manquait presque jamais de rentrer celles que l'adversaire lui concédait. Avoir trois très bon tireurs au pied (et trois autres bons) dissuadait aussi de démolir le 10 quitte à subir un carton pour cela, car le 10, tout en étant le meilleur "snipper" de l'équipe, était remplable dans cette fonction, le 5 faisant office de "grosse Berta" pour les tirs de loin.

. Autre problème posé par le rinnepallo pour certains joueurs: il n'y avait pas de pause à la mi-temps. On changeait de côté aussi vite qu'au tennis, et on continuait, ceci parce qu'en Finlande, initialement, s'arrêter un quart d'heure ou vingt minutes après un effort soutenu, puis reprendre cet effort dans le froid était bien plus pénalisant (pour beaucoup) que ne pas s'arrêter: mieux vallait "battre le fer pendant qu'il est chaud" et rester relativement actif pendant cette pause fatiguait plus (en fin de match) que d'enchaîner directement la seconde mi-temps. Les boissons énergétiques étaient interdites, et l'eau limitée à 1/2 litre par joueur pour tout le match (glaçons permis, mais comptés dans le volume total). Les chaînes de télévision auraient souhaité une pause pour pouvoir passer de la pub, mais la fédération (d'origine essentiellement finlandaise) avait tenu bon: publicité avant ou après le match, bien sûr (par exemple entre la fin et des interviews éventuelles) mais pas pendant. Grâce à cela un match durait 1h31 à 1h32 et était plus facile à caser dans une grille de programmes. L'autre règlementation était qu'aucun match ne devait avoir lieu à des heures d'ensoleillement fort, pour ne pas exposer les joueurs (presque tout nordiques, au début, avant que la France puis d'autres nations d'Europe "classique" s'y missent à leur tour) à trop d'UV. Certains avaient lieu le dimanche matin, surtout quand le foot encombrait les médias le soir. La présence de certains acteurs-cascadeurs de VTP dans l'équipe de VTP22 avait attiré plus de téléspectatrices vers ce sport très télégénique, en fait (même sans Emilianiens) car plus rapide que le rugby et plus varié, du fait des pentes. De plus, les règles du rinnepallo étaient plus simples à comprendre: il n'y avait pas de notion de "passage à vide", la touche ressemblait à celle du football, la notion de hors-jeu aussi, et seul l'en-avant "actif" de plus de cinq mètres était sanctionné, la télémétrie temps réel évitant toute erreur à ce sujet. Plus simple, plus rapide, moins violent mais donnant lieu à bien plus de chutes que le rugby (donc de spectacle à l'écran), le rinnepallo pouvait trouver son public. Il manquait surtout de terrains (trop spécifiques) et d'espace médiatique.

. Les publicitaires qui n'avaient jamais pu utiliser de "VTP" (mais déjà quelques ex-VTP bien moins connus, tout en étant photogéniques) firent excellent acceuil à Torbjörn Hultgren (que le public avait surtout découvert à la télévision comme Siegfried, dans la télésuite "Niebelungen", avant une carrière cinématographique dans les grosses productions) qui allait gagner rien qu'en octobre bien plus que ce que lui avait versé VTP depuis qu'il y était. Toutefois, quitter VTP ne rompait pas les droits d'intéressements déjà obtenus: il continuerait à toucher sa part des recettes que les films l'utilisant continueraient de faire. Aymrald trouvait dommage d'avoir perdu Torbjörn (bien sûr, VTP avait aussitôt importé un nouveau Karéen de VTPSF, ce qui avait au passage privé l'équipe de Juustomeijeri d'un de ses permanents, désormais inclus dans celle de VTP22) mais d'un autre côté, il allait attirer les médias comme un aimant la limaille et donc diminuer d'autant l'attention qu'ils porteraient aux VTP "restés à bord", dont lui. VTP devait payer une TPA sur l'importation du nouveau Finlandais (Lauri Kivinen) mais c'était désormais BFR, employeur du Suédois, qui payaient la sienne. La TPA intra-européenne était toutefois bien moins lourde que l'extra-européenne: raison de plus de ne pas importer de Norvégiens.

. Torbjörn s'était habitué à la vie en France, pays où certaines choses semblaient plus simples [y compris, hélas pour Atte, l'achat d'alcool] et donc les habitantes semblaient beaucoup l'apprécier (beaucoup beaucoup!). Ici il pouvait être une star. Dans son propre pays, il y aurait eu plus de concurrence, bien que l'on n'y trouvât pas si facilement de Karéens en regardant au hasard dans la rue.

. Iivu Kivinen fut importé de Finlande pour le remplacer: VTP estimait avoir besoin de deux Karéens, et il ne restait que Bengt. Iivu considérait VTP comme une promotion (en matière de "calibre" des films et surtout des rôles, c'en était une, même si le record restait détenu par Drakkars et Dragons tourné en Finlande) et savait qu'il n'aurait pas besoin de sortir du "campus" maison, un lieu sûr et bien organisé, aussi sérieux que VTPSF. Il intégra aussi la seconde équipe de rinnepallo de VTP22.

Stéphane put voir un film de VTP dans lequel il n'avait pas joué (tourné en avril dernier), donc dont il ne connaissait que vaguement le thème: "Crimes dans le Transsibérien" (l'excellent titre "compartiment tueur" ayant déjà servi), un film policier à la fois d'enquête (à l'ancienne: on pouvait penser au Crime de l'Orient Express) et de suspens (façon "thriller", car les deux premiers enquêteurs faisaient partie de la série des morts), tout en permettant de découvrir en détails ce train russe légendaire, ses paysages immenses et ses innombrables gares. Des reportages avaient eu lieu sur place, au cours de l'année, permettant de mêler du paysage réel défilant (facile: il avait suffit de faire le voyage avec des paires caméras numériques des deux côtés, selon divers angles (pour ne pas avoir que de la vue transversale) et d'énormes disques durs, en ne filmant qu'aux moments où ça servirait dans le film, d'autres parties (en particulier du train) étant reconstituées en virtuel, certaines étant aussi issues de prises de vues réelles sur place. Le tournage n'avait pas eu lieu là-bas, toutefois, mais y avait été réinséré numériquement, en mélangeant copies réelles de l'intérieur du train et de la synthèse (en particulier pour avoir beaucoup de voyageurs). En toile de fond de l'intrigue (prenante: VTP y avait veillé) c'étaient trois heures de reportage-découverte de ce train. L'office du tourisme russe avait facilité la tâche des équipes de prises de vues de VTP, sachant que le film allait inciter certains spectateurs à entreprendre cette longue croisière ferroviaire. Il avait été ainsi possible de faire des relevés numériques très précis de voitures voyageurs et fourgons vides (au nettoyage), ainsi que des locomotives (électriques. L'électrification avait été terminée dans les années 80), en vue de réaliser des modèles virtuels fidèles, pour ce qui ne pourrait pas utiliser le vrai train sur son vrai trajet faute de pouvoir y mettre les vrais personnages du film au bon moment. Le reportage réel à bord du train avait donné l'idée de quantités d'anecdotes et de personnages truculents ou folkloriques inspirés par la réalité.
. Il se chuchotait que ce film (où l'on ne trouvait ni Erwann d'Ambert, ni la "valeur montante" de VTP Vittorio Cario, mais Atte, dans un rôle de jeune Russe alcoolique jouant à la roulette russe, la nuit dans un compartiment avec ses copains tout aussi bourrés) pourrait être "nominé" aux César, comme si cette institution voulait marquer la différence avec la "grosse cavalerie" habituelle signée Kerfilm. C'était le film le plus récemment sorti utilisant Atte. Une des critiques était:

- Moscou-Vladivostock en trois heures par le rail: il ne s'agit pas d'un TGV supersonique russe mais de "Crimes dans le Transsibérien". L'intrigue grouille de fausses pistes et sert de fil conducteur à un voyage dans un univers ferroviaire et une galerie de personnages étonnants.

. N'étant pas un film d'action intensive (mais où il se passait néanmoins beaucoup de choses) Stéphane choisit de le voir en russe (sous-titré russe et français), parmi ce qui était disponible à certaines heures dans l'une des deux salles VTPSF bien qu'il n'eût pas été tourné dans cette langue.

. La prochaine sortie serait "Les hordes", le 7 puis le 10 octobre 2001. Atte y avait un rôle annexe, ce qui assurait que ses fans aillent le voir, mais VTP avait du mal à estimer l'impact de ce film, de même que pour "L'île ingénieuse", car créer toute une civilisation parallèle (ou histoire parallèle. Pas juste une variante comme dans Gamma) n'accrocherait qu'une partie du public. Il y aurait bien sûr les amateurs de HF à la Kerfilm, pour "les hordes". Le coût de tournage de Gamma serait élevé (mais pas dissuasif) sans rapporter plus (supposait VTP) que la moyenne de ses autres films. Il fallait reproduire ou synthétiser fidèlement quantités de contextes différents, pour que ça n'ait pas l'air mesquin. Le Crépuscule de Rome avait consommé énormément d'infographie (et en consommait encore, d'où le fait que VTP n'était pas pressé de sortir Gamma tant que le péplum auquel Tarsini tenait tant n'aurait pas libéré l'infographie) mais il marcherait certainement très bien: un "porte-avions", le public ayant déjà vu de quoi Kerfilm était capable en matière de péplum dans l'Iliade, l'Odyssée et "César et les Vénètes".

. En octobre, Stéphane allait plus à la piscine qu'au lac [car il ne pouvait pas nager assez longtemps dans le lac, vu la température, donc au total ça avait un moins bon rendement que dans la piscine à 18°C], donc n'y rencontra Leo (occasion de bavarder) qu'une semaine plus tard. Ils parlèrent du Transsibérien (aucun ne l'avait pris mais tous deux avaient vu le film), des nouveaux avions russes et des possibilités de centrales géothermiques abyssales comme dans "0016: alliage désentropique", la mécanique quantique et la possibilité théorique ou non de réaliser un tel alliage faisant aussi partie des sujets abordés.

. Grâce à la reprise des entraînements au simulateur chez VTPSF, Stéphane estimait avait fait des progrès significatifs en plongeons du "5m". Il s'entraînait aussi à des sauts périlleux avant ou arrière dans le système de VTPSF, que Kasperi et d'autres utilisaient aussi, à d'autres moments. Ce fut le samedi 13 octobre qu'il tenta pour la première fois de plonger en vrai depuis le "5m" de la piscine géothermique. Il avait fixé au dossier d'une banquette un camescope numérique (AK en faisait aussi, au grand dam des Coréens, Japonais et même Chinois) pour pouvoir revoir ensuite son plongeon. Il avait senti des éclaboussures à la fois devant et derrière, donc ça ne devait pas être trop mal réparti. Vérification faite, c'était acceptable, sans être un beau plongeon. Il recommenca cinq fois, en obtenant trois meilleurs et un pire, puis remit ses palmes (les petites) et fit ses longueurs de bassin comme d'habitude.

. Dans un autre pays, cette activité (ou d'autres) auraient pu conduire les gens à bavarder un peu, échanger des suggestions pour réussir ceci ou cela, etc. Ici, non. Chacun faisait ce qu'il avait à faire, comme à l'usine. Stéphane imita donc ce comportement, qui ne le surprenait pas de la part des Finlandais: "un pays de robots, bien plus que le Japon", lui avait-on dit avant qu'il n'y aille. Sauf quand on versait assez d'alcool dans les robots pour y activer d'autres programmes.

. BFRSF le confia aussi à VTPSF (comme Mika) pour travailler, entre autres, sur l'amélioration de l'autonomie de gestion de mouvement des tigres de Sibérie artificiels, qui devaient imiter la souplesse et le confort de mouvement des vrais félins. Dans la pratique, on lui avait conseillé d'étudier et filmer en "multiscopie" (8 caméras) Gorak: "à part le poids et la taille, ça fonctionne comme un chat". Le poids et la taille étaient un avantage pour la robotique, les déséquibres se produisant moins vite que pour un petit modèle. De plus la gestion des appuis, adhérences, etc, était plus précise quand le poids augmentait: il eût été difficile de mettre au point un ABS fonctionnant correctement pour une voiture-jouet, l'adhérence de petits pneus si peu chargés étant bien plus capricieuse que pour une vraie voiture. La nouvelle version du faux tigre de Sibérie (partie logicielle étudiée à La Défense par leurs cybernéticiens, et télétransmise au divers noyaux multiprocesseurs AK gérant divers groupes de fonctions dans le robot) intéressait beaucoup Stéphane. Il devait pouvoir faire tout ce que l'on faisait faire à un tigre de cirque, plus les attitudes "quartier libre" d'un chat, ainsi que les scènes de traque, d'embuscade et de prédation. La structure ne copiait pas un squelette vivant, car certains os des pattes étaient téléscopiques, pour mieux encaisser les chocs de réception, en attendant que la gestion hydroélectronique des "muscles" des articulations pussent le faire seuls. Il n'y avait pas une colonne vertébrale au sens habituel mais un "maillage actif" entre des côtes, formant cage déformable (comme déjà utilisé dans des robots serpents de mer de grand diamètre) en répartissant bien mieux les efforts qu'une structure unique: c'était à la fois moins lourd et plus tolérant aux chocs. Pas de bassin rigide non plus, mais une variante de la triangulation (homoplate et clavicules) de l'avant, pour un maximum de souplesse et de tolérance aux chutes, tout en pouvant donner l'impression, sous la fourrure, d'une marche classique. Stéphane compris d'ailleurs pourquoi ces animaux, quand ils sautaient de haut, atterrissaient sur les pattes avant: la souplesse du montage "triangulé" rendait ces pattes bien plus tolérantes à l'impact que les autres: une possibilité de flexion supplémentaire aux ancrages, évitant de brutaliser l'équivalent d'un "col du fémur". La fracture du col de fémur chez les humains âgés venait donc de qu'ils marchaient sur des pattes qui n'étaient pas conçues pour amortir les percussions engendrées par la marche bipède, beaucoup moins fluide (même quand on faisait attention) que la marche quadrupède, tout particulièrement en descendant un escalier. Pour ménager ses articulations, l'humain aurait dû les descendre à reculons: comme les échelles, puisque l'évolution n'avait pas eu le temps de diviser son bassin en éléments articulés entre eux et rappelés en position par des muscles. En plus, avait déjà remarqué Stéphane en voyant un squelette, le col du fémur était quelque chose qui aurait fait renvoyer pour faute grave tout ingénieur qui aurait conçu cela ainsi: non seulement ça se rétrécissait, au lieu de s'épaissir là où il l'aurait fallu, mais en plus cette partie ainsi fragilisé par conception travaillait en porte-à-faux, et non en empilement comme c'eût été le cas en mettant l'articulation bien droite au dessus de l'os, ce qui n'aurait eu, mécaniquement, que des avantages. De même que les constructeurs automobiles s'étaient mis à saboter délibérément leurs moteurs en remplaçant la chaîne de distribution (d'une longévité très supérieure, et qui, de plus, se mettait à faire du bruit bien avant de lâcher) par une courroie crantée (dispositif acceptable pour entraîner un alternateur -plutôt qu'une lisse gâcheuse d'énergie- mais pas des arbres à cames), l'être humain avait son articulation de la hanche sabotée par conception. Seule prévention: rouler plus (vélo, patins) et marcher moins, pour diminuer les chocs.
. Ce tigre mécanique pourrait théoriquement atterrir sans dommage sur ses pattes arrière, mais pour le réalisme de comportement, à l'écran, il amortirait d'abord sur l'avant, comme un félin naturel.
. Se rouler sur le dos, faire sa toilette de partout, tout ceci, mimé sur des chats et des vidéo de vrais tigres était assez facile à "rotoscoper" dans ses logiciels comportementaux. Grimper aux arbres (griffes rétractables fonctionnelles, capacité à opposer les pattes avant comme un vrai félin ou un ours) était déjà plus compliqué: il devait détecter la disposition des branches ainsi que tous les obstacles à sa progression future une fois telle ou telle "voie" choisie. Attrapper des proies réelles eût été trop compliqué pour un robot de 2001, même aussi perfectionné cinématiquement que celui-ci, mais il s'agissait de proies "mécanimales" elle aussi: le logiciel comportemental piloterait les deux, communiquant sans nécessité d'analyse cinématique "matérielle" d'image (là était le gain, énorme, par rapport à une vraie chasse) la position et l'orientation de chaque partie de l'autre animal tant à la proie (pour miner l'évitement et la défense) qu'au prédateur pour savoir quand et où bondir, saisir à pleines pattes puis mordre à la nuque. Chaque robot guiderait l'autre, assurant un suivi précis malgré les imprécisions de mouvements dûes à l'élasticité, au glissement par rapport au sol, etc. Des transpondeurs, glissés sous la peau de la proie aux endroits adéquats pour chaque scène, guideraient directement les pattes du fauve (qui les "voyait" par ses paumes) et la canine (droite ou gauche, selon le sens de l'attaque) censé poignarder entre les vertèbres cervicales.
. Outre l'imitation du vrai tigre de Sibérie, il y aurait celle du "tigre aux dents de sabre" (qui ressemblait plus à une panthère géante qu'à un tigre, en fait) pour un film préhistorique.
. Ces travaux d'optimisation de comportement de robots animaliers absorbaient assez Stéphane pour le pousser à rester plus tard chez VTPSF. Beaucoup d'essais, de mesures, d'évaluation: c'était un autocorrélateur, comme pour les tests gustatifs, qui testait au "hasard orienté" diverses modifications de comportements et les classait selon la notation que leur donnait Stéphane en l'observant, pour converger vers des groupes de comportements de plus en plus crédibles, sans que Stéphane eût à indiquer ce qu'il fallait modifier: c'eût été lent et compliqué, en plus du fait que lorsque c'était une impression générale il n'aurait pas sû déterminer lui-même ce qui n'était pas encore "tout à fait ça".

. Le second match d'automne contre Uppsala fut gagné de onze points par Juustomeijeri: tout le monde avait retrouvé ses marques, en plus d'une analyse infographique intensive du match perdu d'octobre, dont la télévision suédoise n'avait retransmis le match qu'en différé (à partir de l'enregistrement finlandais), après avoir appris la victoire suédoise. La victoire finlandaise, elle, passa en direct à la télévision suédoise, qui avait réservé un créneau pour ne pas manquer la réédition éventuelle de l'exploit d'octobre.

. Erwann apprit qu'il existait maintenant des équipes de rinnepallo aux Etats-Unis (où il existait certainement au moins une équipe de n'importe quel jeu pratiqué quelque part dans le monde, y comprit la pelote basque) et que l'une d'elle (d'UCLA, Los Angeles) allait faire le voyage en Suède et en Finlande pour rencontrer quelques clubs. Elle ne renconterait Uupsala, Turku ou Juustomeijeri qu'en cas de résultats valables contre les "petits" clubs suédois et finlandais, de façon à ne pas faire perdre leurs temps aux équipes de première division.

. Ce qui manquait encore dans le rinnepallo, c'était l'hémisphère sud: seule l'Argentine avait quelques clubs. Si les grandes nations du rugby s'y étaient mises, on aurait pu organiser une coupe du monde. L'interdiction statutaire de toute rémunération directe ou indirecte (donc y compris via des contrats publicitaires) des joueurs était probablement un frein, tout en garantissant le maintien du côté populaire et "propre" de ce jeu, faute d'argent pour le corrompre. L'utilisation d'un ballon-dé nuisait aussi à l'image du jeu: c'était ce côté "intervilles" qui plombait sa crédibilité, mais expliquait probablement qu'un terrain (moyennant un bon système d'irrigation, en plein désert) eût été créé près de Las Végas: en effet, s'il l'on ne devait rémunérer ni les joueurs ni les clubs, au rinnepallo, rien n'interdisait à des bookmakers indépendants de prendre des paris sur les scores, donc un jeu utilisant un dé comme ballon avait aussitôt séduit ces Américains.

. Cyberlander sortit le 4 puis le 7 novembre 2001. Le film lui sembla bien meilleur qu'il en avait eu l'impression en le jouant, car il n'en connaissait alors ni le rythme, ni les scènes autres que les siennes, ni le rendu final de tout ce qu'il ne voyait pas pendant le tournage. Il avait à l'entraînement un décor et des adversaires ou obstacles virtuels, mais ce n'était qu'indicatif, pour aider à gérer les mouvements: VTP pouvait changer totalement l'ambiance luminieuse et même tout ce qui n'avait pas d'importance directe pour ce que faisait le personnage. Il y avait du patin à roulettes, il y avait de grandes épées, il y avait des sauts, il y avait du sang, et les décors urbains qu'il aurait supposé sordides devenaient impressionnants (tout en étant peu engageants à fréquenter), tel que VTP les avait post-produits. Ce qui se passait dans l'ancienne usine de l'île Seguin l'impressionna. Il supposa que ce film n'aurait pas le succès (qui se poursuivait) de "Peur Filante", mais qu'il ne serait pas un "petit chalutier", dans l'échelle des succès de VTP.

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